L’artiste philippin Gregory Halili a utilisé des coraux morts comme matériau de base pour représenter des parties de l’anatomie humaine. De cette manière, il renvoie au lien inévitable qui existe entre l’homme et la nature, surtout quand il est question de sa destruction. Le parallélisme ainsi obtenu entre le sort des coraux et celui des êtres humains est particulièrement dérangeant. En effet, comme le dit Paul Watson, fondateur de l’ONG Sea Shepherd : « Si les océans meurent, nous mourrons » !

Gregory Halili est un artiste né aux Philippines en 1975, exerçant actuellement son art dans le New Jersey. Son œuvre est marquée par son enfance ainsi que la faune et la flore des Philippines. Dans ses réalisations, il utilise souvent des matériaux naturels peu communs, tels des coquillages ou des coraux récupérés sur les plages. Ses œuvres les plus récentes représentent diverses parties anatomiques d’un squelette humain : des cages thoraciques, des crânes ou encore des mains. La ressemblance du corail blanchi avec les os humains est frappante. Une œuvre nécessairement engagée en faveur de l’environnement alors que, partout à travers le monde, les coraux meurent en silence.

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Le blanchissement accéléré des récifs de corail

Les coraux sont des animaux qui, en s’associant les uns aux autres, forment des récifs qui peuvent s’étendre sur de nombreux kilomètres. Ces structures sont parfois vieilles de plusieurs milliers d’années et servent de refuges pour de nombreuses espèces. Elles forment ainsi des écosystèmes complexes et jouent un rôle particulièrement important pour la biodiversité.

Cependant, les activités humaines mettent en danger la survie de ce patrimoine naturel. Depuis 1950, environ 1/5 des récifs coralliens ont disparus et, aujourd’hui, tous sans exception à travers le monde souffrent du changement climatique – ce qui se manifeste par leur blanchissement et leur mort prématurée. Ce blanchissement a comme principales causes la hausse de la température des mers et leur acidification, elle-même conséquente aux activités humaines (pollutions, industries, déchets…).

Des scientifiques de l’Université James Cook de Townsville ont récemment publié les résultats d’une étude dont les chiffres sont assez alarmants : plus de 90 % des coraux de la grande barrière de corail en Australie sont affectés par un blanchissement sans précédent. Bien que ce blanchissement ne soit nécessairement pas synonyme de mort, il indique un état de stress qui précèdent le plus souvent la mort de ces êtres vivants complexes. Ce phénomène est donc global : il concerne donc autant les caraïbes, l’Indonésie, les Maldives ou encore les Philippines d’où viennent les coraux qu’utilise Gregory Halili pour ses œuvres.

Par ailleurs, dans de nombreuses régions, des pratiques de pêche non soutenables ont conduit à la destruction de larges parties des récifs, en raison d’une surpêche industrielle ou de l’utilisation de dynamite et de cyanure.

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Le corail, un acteur indispensable des océans

Les espaces qui se trouvent à la jonction entre deux milieux différents jouent généralement un rôle indispensable et sont le lieu d’une grande richesse naturelle. Les récifs coralliens, à l’intermédiaire entre terre et mer n’échappent pas à cette règle et sont un lieu d’abondance et de diversité. Plus d’un million d’espèces animales et végétales y vivent en interdépendance, soit environ 25% de l’ensemble des espèces marines connues. Avec les forêts tropicales, ce sont les espaces naturels les plus riches sur la planète.

Par ailleurs, les récifs coralliens ont la caractéristique d’absorber une partie de l’énergie des vagues et protègent ainsi les côtes de l’érosion naturelle. De cette manière, ils jouent un rôle économique, social et culturel de premier plan. Entre 500 millions et 1 milliard de personnes dépendent aujourd’hui du corail. Ce milieu joue un rôle également important pour la pêche locale et est une source importante de revenus touristiques. En 2010, il a été évalué que la disparition des récifs coralliens coûterait 172 milliards d’euros par an à l’humanité, en raison de l’ensemble des services écosystémiques dont ils sont à l’origine.

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Les récifs coralliens d’ores et déjà condamnés ?

Alors que les études montrent que les récifs coralliens sont en grand danger, la Nasa lance un nouveau programme de recherche pour comprendre les interactions à l’origine du dépérissement du corail. Plusieurs éléments agiraient de manière simultanée : le réchauffement climatique, la pollution et l’acidification de l’eau. Ce sont les interactions entre ces causes qui doivent faire l’objet de cette nouvelle étude. Cependant, certains scientifiques estiment qu’il est déjà trop tard pour sauver les coraux, qui ne pourraient survivre à une concentration de CO2 supérieure à 350 PPM. Les accords climatiques ne visant pas à inverser la machine, mais simplement à ralentir la vitesse du réchauffement climatique, on peine à croire qu’une nouvelle COP puisse résoudre la situation.

La prise de conscience à laquelle Halili appelle n’est cependant pas veine : des initiatives locales de restauration ont en effet abouti à des résultats très positifs ! C’est notamment le cas du Manta Reef Restoration project qui a permis une renaissance de la biodiversité locale ainsi que la création de nouveaux emplois. En Indonésie, une autre initiative de restauration soutenue par Coremap a également obtenu des résultats encourageants : dans les îles de Wakatobi l’économie locale a rebondi depuis que les récifs détruits ont été restaurés. À travers le monde, des petites organisations s’activent sur le terrain pour éviter l’effondrement annoncé de nos récifs coralliens.

Cranes-Nacrés-par-Gregory-Halili-05Gregory Halili sculpte également des coquillages


Sources : artsy.net / le monde.fr / nouvelobs.com / thisiscolossal.com / Toutes photographies à la discrétion de Gregory Halili (instagram.com)

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