Des chercheurs australiens de l’Université de Townsville viennent de dévoiler les résultats de leur étude sur le corail. Parmi 520 récifs observés dans la partie nord de la grande barrière de corail, seulement 4 étaient en parfaite santé. Ainsi, plus de 99% des échantillons dénotent des traces de blanchissement, l’étape qui précède leur possible mort.

C’est un bien triste constat que doivent tirer les chercheurs australiens de l’Université James Cook à Townsville. Ceux-ci viennent de mettre en évidence l’état de santé aggravé de la grande barrière de corail, pourtant inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. S’étendant sur 344 400 km², englobant 2 900 récifs depuis Bundaberg à la pointe du Cap York en Australie, il s’agit du plus grand récif corallien du monde. Du moins, il pourrait ne plus le rester bien longtemps si son état de santé continue à se dégrader à une vitesse record.

Car le corail est avant tout un organisme vivant complexe et fragile. Considéré comme un animal, le corail se constitue en colonies de polypes où chaque individu élabore son propre squelette. Ensemble, ils forment un « superorganisme » qui permet, en principe, d’assurer la durabilité et la sécurité de l’espèce. Les récifs coralliens jouent surtout un rôle fondamental pour la biodiversité. Ils permettraient d’attirer et abriter pas moins d’un quart de toutes les espèces marines. Et pour cause, ils offrent supports, abris et nourriture à des espèces de toutes tailles. Si le corail meurt, c’est l’océan qui meurt. Et comme l’exprimait le capitaine Paul Watson dans son livre : « Si l’océan meurt nous mourrons » !

Coral-Bleaching_french

Des résultats qui font froid dans le dos

Les chercheurs de la James Cook University ont d’abord survolé et documenté 520 récifs du littoral Nord-Est australien. Ils vont alors observer des traces de blanchissement du corail (dépérissement) sur 516 zones observées. Seuls 4 récifs, soit 0,7% des observations, étaient parfaitement sains. Un record historique dont les chercheurs se seraient bien passés. Le professeur Terry Hughes, expert en récifs coralliens et responsable de l’étude, estime que la situation est aujourd’hui critique : « Nous pouvons observer un très haut niveau de blanchissement au Nord de la grande barrière de corail sur des milliers de kilomètres. » S’il reste difficile de préciser la part des récifs qui s’apprête à mourir, la moitié du corail atteint de ce blanchissement pourrait s’éteindre dans les mois à venir, précise-il.

Ce blanchissement visible à l’œil nu n’est pas qu’un simple phénomène de décoloration. En effet, le corail vit en symbiose avec des zooxanthelles, des petites algues unicellulaires. Ces êtres fournissent oxygène et nutriments pour permettre aux coraux de survivre. Mais en situation de stress, le corail réagit en expulsant ses zooxanthelles. Sans cette symbiose, les polypes dépérissent, perdent leur couleur et finissent par mourir. Par effet boule de neige, toutes les autres espèces en pâtissent. Le corail autrefois coloré et grouillant de vie perd ainsi peu à peu de son éclat pour blanchir avant de s’éteindre. On peut donc aujourd’hui observer des « zones mortes » où ces rares oasis laissent place à des cimetières marins.

XL-Catlin-Seaview-Survey-American-SamoaBlanchissement d’un récif / Photographie à la discrétion de XL Catlin Seaview Survey

L’activité humaine en cause

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Pour le professeur Justin Marshall, expert en coraux de l’Université du Queensland, la principale raison de ce blanchissement est clair : « Ce que nous pouvons observer aujourd’hui a inévitablement un lien avec le changement climatique » explique-t-il. Les coraux sont en effet très sensibles à la modification des paramètres de l’environnement. L’augmentation des températures des eaux de surface, la montée du niveau de la mer et les dérèglements climatiques seraient des sources importantes de stress pour les coraux.

Par ailleurs, l’activité humaine locale tiendrait également une grande part de responsabilité dans la mort systémique du corail. Pour ne citer qu’eux : l’augmentation de l’acidité des océans liée aux excès de production de CO2; la présence de produits toxiques comme les dérivés de pétrole ou certains composants des crèmes solaires; la baisse du zooplancton elle même liée à l’activité humaine; la surpêche; le déversement des eaux usées qui transportent nitrates et phosphates (élevage, agriculture chimique,..); la présence de micro-plastiques et l’effet de serre. Paradoxalement, on estime que les récifs génèrent un bénéfice net d’environ 30 milliards de dollars par an à l’échelle globale, à travers les activités touristiques et la pêche.

De l’immobilisme à l’activisme

Pour le professeur Marshall, cette situation est le fruit de 20 années d’immobilisme politique. L’homme n’a pas caché sa colère. « Je suis vraiment fâché que le gouvernement ne nous écoute pas et ne prenne pas en compte les éléments que nous leur donnons depuis 1998. (…) Il était inévitable que ce blanchissement se produise dans ces conditions, et aujourd’hui, ça se réalise. » Cependant, le professeur garde espoir. La partie sud de la grande barrière de corail semble en meilleur condition. Il est toujours temps de s’engager dans une vaste campagne de protection et de transplantation, tout en modifiant profondément, et dans l’urgence, nos modes de vie et de production.


Sources : wikipedia.org / euronews.com / abc.net.au / telegraph.co.uk

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