Ces dernières années ont vu proliférer sur le marché des centaines de labels censés nous certifier la qualité, l’éthique ou l’éco-responsabilité des produits que l’on achète. Un logo ou une étiquette suffisent à orienter nos choix au supermarché et nous assurer de la « durabilité » des produits. Mais les apparences sont parfois trompeuses… De plus en plus de ces fameux labels sont pointés du doigt, s’avérant n’être qu’arguments marketing ou démarches incomplètes. Or, avec plus de 400 labels écologiques existant dans le monde à l’heure actuelle, il n’est pas toujours évident pour le consommateur de s’y retrouver… Petit guide pratique.
Parmi les écolabels les plus répandus, l’EU Ecolabel a notamment été largement critiqué par plusieurs associations de consommateurs soucieuses de l’environnement, en raison du fait qu’il ne serait pas suffisamment contraignant dans ses critères d’attribution, en particulier en ce qui concerne les produits d’entretien. Alors lessives, multi-surfaces ou liquides vaisselle sont-ils vraiment éco-friendly lorsqu’ils arborent l’EU Ecolabel ? Mr Mondialisation s’y est intéressé de plus près, et a tenté de clarifier la fiabilité de ce label environnemental européen.
L’Ecolabel européen : pour quoi et pour qui ?
A l’origine, l’EU Ecolabel a été lancé en 1992 par la Commission Européenne afin de « promouvoir la conception, la production, la commercialisation et l’utilisation de produits ayant une incidence moindre sur l’environnement pendant tout leur cycle de vie ». Il est désormais très répandu et se retrouve sur plus de 50 catégories de produits non-alimentaires : des produits d’hygiène et ménagers aux textiles, de la peinture et papier jusqu’aux campings et gîtes.
Pour ce qui est de sa méthode d’attribution, le label prend en compte le cycle entier du produit, depuis l’extraction des matières premières à sa fabrication, distribution et jusqu’au moment où le produit sera jeté. Cette prise en compte du cycle global du produit représente un avantage de ce label, en comparaison à des écolabels qui ne prennent en compte qu’une partie de la chaîne pour garantir un produit « bio », « made in France »,… et qui, de cette manière, dupent complètement le consommateur.
Les contrôles pour l’attribution du label s’effectuent sur toute la chaîne du produit par un organisme indépendant et l’EU Ecolabel n’est attribué qu’à 10 à 20% des produits du marché, les plus respectueux pour l’environnement tout en étant au moins aussi performants que les autres produits du marché. Les produits labellisés sont contrôlés de manière régulière pour vérifier s’ils répondent toujours aux critères du label, eux aussi en constante évolution.
Jusqu’ici, tout semble donc aller dans le bon sens…
Des critères trop peu exigeants…
Cependant, ces dernières années, l’EU Ecolabel est dans le viseur d’enquêteurs peu convaincus de sa valeur environnementale en ce qui concerne les produits d’entretien. Et oui, pour un label officiel d’une telle ampleur et importance, et que beaucoup d’Européens considèrent comme un des écolabels les plus fiables, il s’avère que l’EU Ecolabel n’a pas un cahier des charges aussi exigeant qu’il le devrait…
En effet, celui-ci ne va pas assez loin dans l’interdiction de certains composants chimiques. En 2011, une enquête du journaliste Matthieu Fauroux diffusée sur M6 dénonce ce manque de critères et le fait que le label, concernant les produits d’entretien, est attribué sans analyse chimique des produits. Ainsi, à l’époque, le journaliste révèle la présence de phosphates dans des produits ménagers labellisés EU Ecolabel. Le phosphate est pourtant malheureusement connu pour dérégler les écosystèmes lorsqu’il se retrouve dans nos eaux usées. Depuis, la Commission Européenne a néanmoins inclus l’interdiction des phosphates dans les critères d’attribution du label.
Dans son dossier « Les labels sous la loupe », Ecoconso en arrive à la même conclusion. Il en ressort principalement que, bien que l’Ecolabel soit un bon pas vers des produits plus respectueux de l’environnement, les critères de l’Ecolabel européen ne seraient pas toujours suffisamment contraignants.
Consoglobe a pointé plus précisément les défauts de l’EU Ecolabel pour les produits d’entretien. Comparé à d’autres labels plus restrictifs, l’Ecolabel autorise encore certains produits synthétiques tels que les conservateurs, parfums ou colorants, et des composants issus d’éthoxylation (réaction chimique) qui seraient nocifs pour la santé et moyennement biodégradables. D’ailleurs, l’EU Ecolabel n’exige pas une « biodégradabilité optimale » de ses produits mais seulement une biodégradabilité de 60% en 28 jours, et encore… ce critère n’est valable que sur les tensio-actifs (bases lavantes).
Enfin, il faut préciser que l’Ecolabel de l’UE table aussi sur une démarche volontaire du fabriquant. Chaque entreprise qui souhaite obtenir l’Ecolabel doit elle-même en introduire la demande. Cela explique que certains produits peuvent avoir une empreinte carbone très limitée (parfois plus que d’autres pourtant EU labellisés), comme ceux que l’on retrouve dans des magasins bio, sans pour autant disposer du label européen.
Malgré son caractère officiel et répandu, l’Ecolabel n’est donc pas le label écologique le plus contraignant et ce, plus particulièrement en ce qui concerne les produits ménagers tels que les lessives et détergents. Et de toute évidence, une réelle conscience de l’urgence climatique actuelle ne laisse plus de marge à des demi-mesures.
Mais alors, quels labels privilégier ?
En ce qui concerne les produits ménagers, les labels Ecodétergents du groupe Ecocert et Nature & Progrès sont les plus poussés et fiables car ils exigent que les produits soient faits uniquement à partir de matières premières végétales permettant une biodégradabilité optimale de 100%.
Nature & Progrès va même encore plus loin en exigeant que tous les ingrédients du produit soient issus de l’agriculture biologique.
Conclusion : mieux que rien, mais…
Même s’il convient de se méfier des étiquetages qui peuvent parfois (voire souvent) être trompeurs, l’Ecolabel européen ne relève pas non plus du greenwashing à proprement parler. Il s’agirait cependant pour la Commission Européenne de prendre ses responsabilités pour la planète et de mettre en place des critères plus restrictifs pour les composants chimiques autorisés ou le niveau de biodégradabilité exigé, en bravant les contestations des firmes ou fabricants qui s’y opposeraient. Un moyen d’être cohérent avec l’image du label diffusée et la confiance qu’elle invite à confier à ce dernier.
En résumé, et à choisir : en grande surface, il est préférable d’opter pour un produit labellisé Ecolabel contre un produit qui ne l’est pas. En revanche, s’il est possible de choisir un produit labellisé Ecocert ou Nature & progrès, cela garantit une démarche écoresponsable plus poussée et globale, réellement efficace au regard de la planète. Enfin, si possible, la meilleure des solutions reste de fabriquer soi-même ses produits d’entretien : vinaigre, citron et bicarbonate de soude sont nos meilleurs alliés pour une maison propre… et une bonne santé !
Delphine de Hemptinne
Sources
Site de L’EU Ecolabel
« Les produits ménagers écologiques avec l’Ecolabel insuffisant », 24 octobre 2011
« Les labels sous la loupe – Guide de défrichage pour éco-consommateur », Ecoconso, 09 mars 2015
« Les labels entre crédibilité et marketing », Karin Dubois, Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation, juin 2018
“EU Regulation 66/2010 on the EU ecolabel: in between green consumerism and green wash?”, Armelle Gouritin, R. E. D. C., 2012/3, pp. 493-494
« Ecolabel et produits d’entretien : « Peut mieux faire » », Annuaire vert
« Ecolabels : attention aux faux », Consoglobe, 21 Janvier 2011
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