Alors que les États-Unis et la Russie jouent à nouveau des muscles, faisant planer la menace de frappes nucléaires, la montée en puissance de la Corée du Nord, qui s’est également dotée de la technologie, replace l’arme atomique sous le feu des projecteurs médiatiques. Présentée par les puissants comme facteur d’équilibre et de paix, l’arme nucléaire n’est que rarement remise en question par les États qui la possèdent. Pourtant, rappelle La bombe et nous (2017), un documentaire de Xavier-Marie Bonnot, le futur peut être imaginé autrement que par un équilibre de la menace nucléaire d’une poignée de pays.

L’équilibre de la terreur. Théorie brumeuse s’il en est, fondée sur quelques 80 années d’histoire et qui ne demanderait qu’une seule exception pour confirmer son invalidité. Théorie qui occulte également les risques inhérents à l’arme atomique et que font peser une minorité de décideurs sur la majorité de la population. Elle aura malgré tout justifié le développement de milliers d’armes nucléaires depuis la fin de la seconde guerre mondiale – environ 17 000 à ce jour – dont plusieurs milliers prêtes à être déployées en à peine quelques minutes. De quoi détruire plusieurs fois la planète terre sur la simple décision d’Hommes. Mais puisque tout est question d’équilibre…

Quand toute opposition est reléguée en rang d’utopie

Face aux arguments déployés par les « rares » États qui sont en possession de la bombe, difficile d’aborder la question sans entrer dans la caricature. Les défenseurs de la bombe se positionnent en tant que pragmatiques éclairés et relèguent, sans plus de débat, au rang d’idéalisme utopique les revendications allant dans le sens d’un démantèlement de l’arsenal nucléaire. La bombe serait à la fois un outil de défense dans un monde incertain, et la garantie, en tant qu’outil de dissuasion militaire, d’un ordre mondial moins trouble.

En d’autres termes, les opposants à l’arme atomique sont dépeints comme doux rêveurs, n’ayant pas conscience de l’évolution récente des relations internationales, rendues instables par la montée en puissance de nouveaux acteurs (monde multipolaire). On notera, non sans humour, qu’auparavant, c’était la bipolarité du monde, partagé entre les USA et l’Union soviétique, qui justifiait la course effrénée à l’armement atomique.

La démocratie bafouée

Le débat à ce sujet est tout sauf démocratique. Les citoyens et les citoyennes ne peuvent jamais s’exprimer sur la question – les affaires militaires faisant partie des prérogatives de l’exécutif – et la possibilité de faire usage de l’arme atomique est remise de manière quasi exclusive entre les mains d’une seule personne. À l’image de l’ICAN (Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires), collectifs et associations sont cependant de plus en plus nombreux à élever leur voix.

Mais en dépit de la mobilisation citoyenne, dont l’histoire est d’ailleurs aussi longue que celle de l’arme, le débat n’a jamais été ouvert au public. Et si 2017 a été marqué par l’adoption à l’ONU par 123 pays d’un projet de traité sur l’interdiction des armes atomiques, les puissances détentrices n’acceptent pas, en dehors d’affirmations de principe, de s’assoir à la table des négociations, refusant même de reconnaître les discussions, au motif qu’un tel traité « méprise clairement les réalités de l’environnement sécuritaire international ».

« L’arme nucléaire a-t-elle encore un sens aujourd’hui ? »

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Vivons-nous toujours une guerre froide sans en dire le nom ? Les leaders politiques manquent-ils de discernement ? Un monde sans arme nucléaire est-il encore possible ? Serait-il véritablement plus dangereux et marquerait-il une récurrence des guerres ? Le documentaire La bombe et nous apporte un éclairage nouveau, sans donner de réponse définitive à des questions qui resteront inévitablement ouvertes. Il s’attache cependant à déconstruire les mythes sur lesquels le discours en faveur de l’arme atomique s’est construit, rappelant qu’il n’existe pas de garde fou pour empêcher qu’un État fasse demain l’usage de l’arme, que de nombreux éminents cadres de l’armée s’opposent eux-mêmes à son développement incontrôlé et que ces dernières années ont été marquées par la prolifération de la technologie. 9 pays sont désormais dotés de la bombe. Une poignée d’individus ont le pouvoir intégral d’en faire usage. Faudra t-il attendre qu’un État pousse « le bouton rouge » pour revenir à la réalité ?

Pour plus d’informations : cooperativedhr.fr


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