À quelques jours du début du Salon du Livre de Paris, qui se tiendra cette année du 16 au 19 mars, la grogne des auteurs monte sur twitter sous le hashtag #payetonauteur. Ils dénoncent non seulement l’accueil qui leur est réservé par les organisateurs de l’événement mais également la précarité dans laquelle vivent les auteurs et illustrateurs, qui ont du mal à vivre de leur métier.
C’en est trop : face à la précarité grandissante des auteurs et illustrateurs, les professionnels du milieu ont tenu à manifester leur mécontentement à quelques jours de l’organisation du Salon du Livre de Paris. Pour eux, que ce soit pour participer à une table ronde, tenir une conférence ou être présent à une séance de dédicace, les personnes présentes doivent être, en principe, rémunérées correctement pour leur travail. Pour cause, sans eux, l’événement ne pourrait tout simplement pas exister et, par ailleurs, il s’agit tout simplement de reconnaître le travail qui est le leur.
« Tout travail mérite salaire »
C’est donc d’abord via le hashtag #payetonauteur, puis des vidéos, qu’ils ont tenu à s’expliquer sur les réseaux sociaux pour partager et faire connaître leur indignation. Dans une vidéo, l’illustratrice Cy estime que le hashtag qui a marqué la toile ces derniers jours est le « symptôme d’un énorme raz-le-bol de la part des auteurs et des autrices ». Elle rappelle q’ « une conférence c’est aussi un travail » et réagit avec ironie à l’argument selon lequel le Salon serait une aubaine pour elle et ses collègues qui souhaitent se faire connaître du public : « c’est vrai qu’on nous fait une sacré fleur quand on nous propose une conférence de 45 minutes non rémunérée », lance t-elle avec sarcasme. Pendant que les visiteurs payent cher leur entrée (10 euros), les auteur et autrices présents n’en voient en effet pas tous la couleur. Mêmes les plantes vertes sont mieux rémunérées, estime la youtubeuse.
Face au tollé, les organisateurs ont été obligés de réagir rapidement. Contacté par « Sud-Ouest », Pierre Dutilleul, directeur général du syndicat national de l’édition qui est l’organisateur de l’événement, a indiqué que « nous rémunérons toutes les interventions, tables rondes, ateliers, rencontres, qui font l’objet d’un travail, comme cela se fait habituellement et au tarif en vigueur, conseillé par la charte des auteurs », tout en précisant que les interventions de promotion et de dédicace étaient exclues au motif que les personnes sollicitées pouvaient refuser l’invitation et que la promotion sert l’intérêt de l’auteur. En d’autre terme, le Salon serait une vitrine pour les auteurs qui gagneraient à s’y présenter pour se faire connaître. Un peu à l’image de ces illustrateurs et photographes qui devraient travailler gratuitement pour des boites privées en échange d’un pseudo échange de visibilité…
https://twitter.com/sodatime/status/970669647887511554
Des menaces de boycott des lecteurs
Ces arguments n’ont cependant pas suffi à apaiser la colère. Pour de nombreux professionnels du secteur, l’argument de la « visibilité » et de la « promotion » dont ils bénéficieraient par l’intermédiaire du Salon ne tient pas la route. Dans une vidéo publiée sur YouTube, Olivier Gay, auteur de romans policiers et fantasy, estime que « ce n’est pas le salon qui fait notre promotion, c’est nous qui faisons la promotion du salon » et rappelle la grande précarité dans laquelle vivent les auteurs et illustrateurs. Tout comme lui, certains manifestent désormais leur intention de boycotter l’événement, un mouvement suivi par certains visiteurs adeptes du salon qui ont d’ores et déjà exprimé leur solidarité.
Selon une étude du ministère de la culture de 2016, 41 % des auteurs professionnels gagneraient moins que le SMIC. Beaucoup d’entre eux dépendent d’autres revenus puisque 67 % exercent un autre métier pour survivre. La problématique touche tous les acteurs du secteur : fin janvier dernier, le début du Festival d’Angoulême consacré à la bande dessinée, avait débuté sur une polémique similaire, alors que 53 % des auteurs de bande dessinée ont un revenu inférieur au Smic et que 36% d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté.
Pourtant, le secteur est en pleine croissance ! Les lecteurs ne manquent pas, mais les réels créateurs de contenus restent dans la précarité. Au profit de ? #PayeTonAuteur marquerait-t-il le début d’un changement ?
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