Rien de neuf sous le soleil : la pauvreté et les inégalités sociales nuisent gravement à la santé de la population. C’est ce que révèle une nouvelle étude réalisée par la mutualité Solidaris* en Belgique qui expose les effets pervers du manque de moyens pour les personnes et familles les moins aisées, qui ne peuvent se soigner correctement. Il y a deux ans, des constats semblables avaient été faits en France. Pourtant, dans un pays comme dans l’autre, ce sont les politiques d’austérité qui priment, aux dépends de ceux dont les revenus sont les plus bas, mais aussi du fonctionnement des services publics de santé.

En Belgique, « les inégalités de santé ne se résorbent pas ces dernières décennies, au contraire » notait cette semaine la mutualité Solidaris, en Belgique. Dans une étude qualitative réalisée auprès des personnes affiliées, l’organisme met en lumière de manière chiffrée ce dont beaucoup se doutaient déjà : les personnes les plus précaires sont plus exposées aux maladies et aux problèmes de santé. Autrement dit, il existe « une étroite relation entre l’état de santé d’un individu et son appartenance à un groupe social ».

En Belgique inégalités sociales et inégalités de santé se cumulent

On observe plus de maladies, plus de comportements à risque ainsi qu’une morbidité et une mortalité supérieures parmi les personnes précarisées. A contrario, les personnes qui occupent une position sociale plus élevée sont en meilleure santé, jouissent d’une qualité de vie supérieure et vivent plus longtemps, selon Solidaris. En Belgique, les politiques de ces dernières années n’ont pas permis d’améliorer la situation : « les inégalités de santé entre les différents groupes sociaux se sont globalement renforcées ces dernières décennies malgré les progrès en matière de santé publique et les systèmes de protection sociale offrant une large accessibilité aux soins de santé ». Pendant ce temps, l’indice global de confiance et de bien-être s’effrite parmi les plus précaires, marquant leurs craintes croissantes. Si l’étude suggère que la pauvreté accroît les risques pour la santé, il est également légitime de se poser la question inverse : certaines situations personnelles liées à des handicaps ou à des maladies sévères ou rares ne renforcent-elles pas le danger de tomber dans la précarité ? 

Les chiffres fournis par la mutuelle belge sont parlants. Le taux de mortalité avant l’âge de 65 ans est 2 fois plus élevé parmi les personnes issues des milieux les plus précaires comparativement aux milieux les plus aisés. Par ailleurs, leur état de santé est sensiblement plus dégradé avec 3,2 fois plus de personnes en situation de handicap et une prévalence du diabète 2 fois supérieure. Un des facteurs explicatifs de ces chiffres seraient des comportements préventifs moindres parmi les groupes sociaux les plus précarisés, liés à une moins bonne réceptivité aux campagnes de santé publiques, entre autre. Mais peut-on également estimer que les coûts des soins empêchent certains d’y avoir recours pour des raisons de budget ?

En France, les plus pauvres obligés de reléguer leur santé au second rang

C’est en tout cas l’une des conclusions d’une étude réalisée en 2016 en France. Le baromètre Ispos/Secours populaire établissait que les Français les moins aisés sacrifiaient souvent leur santé pour des raisons financières, un phénomène qui s’aggrave depuis la crise financière de 2008. 64% des personnes appartenant à un ménage dont le revenu mensuel net est inférieur à 1200 euros avaient déjà rencontré des difficultés pour payer des frais médicaux et pour la moitié d’entre eux il était arrivé de renoncer à consulter un dentiste. Les enfants sont également concernés, puisque pour 10% d’entre eux, des soins dentaires ou optiques ont été repoussés pour des questions de moyens.

Le « reste à charge zéro » qui vient d’être annoncé par le gouvernement y changera-t-il quelque chose ? Difficile d’y croire, alors que dans le même temps, les déclarations récentes d’Emmanuel Macron suggèrent que les aides sociales à l’intention des plus démunis pourraient être revues à la baisse dans les mois à venir. Par ailleurs, en filigrane, la casse progressive des services publics de santé conduit à la formation de nouvelles inégalités (outre les inégalités géographiques), entre ceux qui peuvent s’adresser à des structures privées et ceux qui sont soumis aux dysfonctionnements de plus en plus nombreux d’un hôpital « à la dérive ». Combien de temps encore les personnes aux revenus les plus modestes verront-elles leurs conditions de vie se détériorer faute de véritable politiques publiques en leur faveur ?

*En Belgique, les mutualités sont au nombre de cinq. Il s’agit d’organismes assureurs en charge du versement des indemnités maladie-invalidité ainsi que du remboursement des soins médicaux et pharmaceutiques. L’affiliation est obligatoire pour les salariés du secteur privé et les indépendants.


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