Gérard Mulliez, fondateur des camps de consommation Auchan et milliardaire, troisième fortune de France, va s’inviter dans une réunion des jeunes communistes de Lille.

Le fait est surréaliste, une « bête » réunion des jeunes communistes de Lille va être interrompue ce samedi par l’entrée fracassante de Gérard Mulliez, visiblement agacé. Il va alors tenter de sermonner les membres de la réunion sur la raison de sa fortune. Un échange à peine croyable démarre entre l’actionnaire et ces quelques jeunes qui rêvent à leur manière de plus d’Égalité en société. Son intervention, immortalisée par une photographie, ne va pourtant durer que 5 minutes mais fait déjà le tour des réseaux sociaux.

A l’origine de sa colère, une affiche du PCF qui réclame plus de justice fiscale au slogan : Ils empochent, nous produisons. Le souci, c’est que Gérard Mulliez est utilisé en exemple de profiteur. En effet, les membres du PCF estiment qu’il est injuste qu’un patron milliardaire voit sa fortune augmenter d’1 milliard d’euros alors que, dans le même temps, le salaire de ses ouvriers n’évolue pas, selon l’affiche. Celle-ci dénonce également les cadeaux fiscaux énormes versés à de grandes sociétés alors que les travailleurs et petits indépendants parviennent difficilement à garder la tête hors de l’eau.

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« Vous n’êtes vraiment pas gentils avec moi » auraient été les premiers mots de Mulliez, témoigne un militant. Personne ne remarque sa présence et les débats se poursuivent. L’homme retire alors sa casquette jusqu’à être reconnu des militants. M. Mulliez, dont le Range Rover est garé en double file (situation d’urgence oblige), va alors se défendre avec le couplet croissance / travail / richesse habituel. « Je crée des emplois avec mes magasins ». Les militants répondent : « Oui, mais les salariés vous permettent de verser des dividendes toujours plus grands aux actionnaires alors qu’ils sont étranglés et exploités ». Le dialogue est strict mais reste courtois selon les observateurs. Selon le grand patron, la position des « partageux » serait du « charabia idéologique et du lavage de cerveau » … On en pensera ce qu’on voudra.

Si l’évènement attire l’attention, c’est que la scène est incroyablement symbolique. Selon Pascal, un militant présent, l’évènement illustre parfaitement le choc des classes où le patron milliardaire semble totalement déconnecté de la réalité de ses travailleurs. À 83 ans, on doit lui reconnaître le courage d’avoir oser affronter le groupe de jeunes communistes. Mais le militant précise que pendant que Mulliez retourne confortablement dans son palace, ses salariés continuent de lutter pour simplement vivre. Aguicheurs, les Jeunes communistes ont fait savoir dans un communiqué de presse qu’ils invitent « publiquement monsieur Mulliez à venir débattre prochainement sur le coût du travail et le coût du capital. » A suivre !

Est-ce de la haine gratuite ? S’il est commun de dire que les « français haïssent ceux qui réussissent » , est-ce bien le cas ici ? Nous pouvons espérer que la plupart des français savent faire la différence entre un entrepreneur de petite entreprise et un actionnaire milliardaire dont le capital est équivalent à plusieurs centaines de milliers d’années de SMIG. Est-ce seulement de la haine que de reprocher à un milliardaire le licenciement de centaines de travailleurs et le gel des salaires alors même que ses bénéfices sont en pleine expansion ? Est-on seulement autorisé à émettre la moindre critique à l’égard de ceux, si on en croit des ONG comme Oxfam ou Finance Watch, manipulent ouvertement les lois en faveur de leur business à travers le lobbying ? De toute évidence, les problématiques de notre temps concernent aussi bien le « smicard » que l’indépendant ou le chef de PME.

Une chose est certaine, si M. Mulliez voulait garder toute discrétion sur sa fortune, c’est plutôt manqué.


Source : Lavoixdunord / L’Humanité

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