Donner la parole à ceux qui détestent l’homosexualité pour mieux déstructurer leur discours, en exhibant ses failles, c’est la démarche inédite du prochain documentaire d’Emmanuelle Schick Garcia, Le Monde Selon les Homophobes. Mais que se passe-t-il dans la tête de ces personnes qui ne tolèrent pas l’homosexualité ? C’est la question que tente d’élucider le long-métrage novateur, à paraître courant 2016.

À l’heure où le mariage entre deux personnes de même sexe est toléré dans de plus en plus de pays, les contestations se font également de plus en plus fortes. La lutte contre l’homophobie et l’intolérance envers les minorités reste prégnante et nécessaire. Or, plus le temps passe plus elle semble s’essouffler, se contentant la plupart du temps de marginaliser les homophobes sans chercher à étudier leur discours pour mieux le contester. Une rhétorique justifiée, certes, mais ne manquerait-elle finalement pas d’efficacité ? Pour lutter efficacement contre l’homophobie, ne faut-il pas prendre le temps de s’adresser aux homophobes pour les amener à se départir de leurs préjugés ? C’est cette perspective originale (risquée ?) qui donnera lieu à une initiative inédite dont la bande d’annonce publiée cette semaine nous offre un avant-goût : Le Monde selon les Homophobes, un documentaire d’Emmanuelle Schick Garcia.

Homophobie en AfriqueIllustration : GLEZ

En 2012, la réalisatrice hispano-canadienne, Emmanuelle Schick Garcia, s’était illustrée dans la lutte contre l’homophobie en adressant à Christine Boutin une lettre ouverte dans laquelle elle dénonçait les positions incohérentes de la Manif pour Tous, telles que son refus du droit des gays à élever un enfant, sans remettre en question ce même droit chez un homme qui, par exemple, battrait sa femme. Près de trois ans plus tard, sa réflexion a eu le temps de mûrir, de s’affûter au gré de nombreuses recherches s’étalant sur deux ans, et c’est en 2016 que le long-métrage, fruit de son engagement en faveur de la tolérance, s’apprête à voir le jour.

Elle poursuit ainsi sur sa lancée avec une démarche sans précédent, celle d’accorder pour la première fois la parole au promoteurs de l’intolérance, afin de mettre en exergue les origines de leur animosité. Une approche risquée et osée qui devrait permettre de mieux cerner l’origine de la haine pour mieux la contrer. Financé à partir d’un crowdfunding, le long-métrage retrace son parcours à travers de nombreux pays, interrogeant et filmant des personnages emblématiques et médiatisés de mouvements dits « homophobes », tout comme de simples sympathisants de ces idées.

Au travers de ces différents témoignages, dont certains font véritablement froid dans le dos, l’homophobie revêt mille visages. Parfois violente, parfois archaïque, parfois modérée, mais jamais bénigne, sa trame de fond reste la même : une insécurité intime, une peur souvent irrationnelle, que des esprits confus auront injustement convertie en haine de l’autre, en jugements froids et vindicatifs. Un documentaire qui s’annonce éprouvant et cru, aux nombreuses scènes choquantes qui dépeignent la réalité d’une homophobie exposée, décomplexée. Qu’on ne s’y trompe pas, sa démarche n’est pas de réhabiliter les homophobes. En juxtaposant leurs témoignages, et en révélant les conséquences de leur haine –allant de l’homophobie ordinaire aux agressions physiques– Emmanuelle Schick Garcia a pour objectif de les confronter face aux incohérences de leurs croyances, et leur nuisance réelle sur l’existence d’autrui. La réalisatrice, d’éducation catholique, entend ainsi démontrer comment les préceptes religieux, lorsqu’ils sont répressifs, et le manque d’éducation sexuelle, sont parvenus à entretenir une culture du tabou, de la honte, à la source même de cette haine. Renversant les a priori, la réalisatrice tient une position novatrice : selon elle, l’homophobie n’est pas naturelle, mais bien culturelle. Il est donc possible d’en venir à bout, notamment par la raison et l’argumentation.

C’est fort de ces constats que la réalisatrice s’est lancée dans ce projet d’envergure qui devrait être traduit en 86 langues pour toucher le monde entier. À cet effet, une campagne de financement participatif a été lancée sur indiegogo. Le Monde Selon les Homophobes suit donc le parcours d’Emmanuelle Schick Garcia et sa lutte engagée, à travers quatre régions dans lesquelles elle questionne et confronte l’homophobie sous toutes ses facettes, depuis la Colombie, jusqu’en Espagne, en passant par Europe de l’Est. Mais c’est en France que commence son étonnant voyage à découvrir durant le courant de l’année…


Sources : fruitflylife.com / newnownext.com / Photographie à la une : Mads Nissen / Soutenir le film

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