Amie des animaux et militante de toujours de leur cause, Lola Webber a co-créé en 2011 une fondation pour leur venir en aide. Parmi les actions de cette fondation, la lutte contre les élevages de chiens en Asie du sud-est, destinés à être mangés, est un des chantiers majeurs. Avec l’aide de bénévoles locaux, de nombreux chiens ont été sauvés et grâce à l’action des militants, les avancées sont notables et les élevages de chiens reculent.

« C’était un froid après-midi de janvier, il y a quelques années sur le marché Moran. Il neigeait et faisait presque nuit. Nous étions sur le point de partir, quand j’ai vu un chien fonçant à travers le terrain de stationnement en face du marché, à seulement quelques mètres des commerçants de viande de chien. Elle était terrifiée et quand je me suis approchée, elle s’est cachée sous une voiture. Je la suppliais de sortir et lui promettais qu’elle serait en sécurité si seulement elle venait avec moi… J’ai rampé en dessous de la voiture en lui tendant ma main. Elle l’a léchée. Je l’ai sortie de là, nous l’avons prise avec nous dans la voiture et sommes partis… Nun (ou Nunnie comme nous l’avons appelée plus tard), a été l’une de ces races considérées comme des chiens à viande en Corée du Sud. Visiblement, elle avait réussi à s’échapper des mains des commerçants. Ainsi, amenée dans notre voiture et en sécurité dans mes bras, l’industrie de viande de chien s’est terminée pour elle. Je me souviens de ce que j’ai pensé à notre départ, « comment quelque chose de si beau peut se retrouver dans un endroit si atroce ». Nunnie vit maintenant aux États Unis, elle est adorée de sa famille et reçoit tout l’amour et la compassion qu’elle mérite… et que tous les animaux méritent. Pour moi, elle sera toujours un miracle et un symbole d’espoir ».

Ce témoignage vient de la Britannique Lola Webber, fondatrice de la fondation internationale Animals for Change, créée notamment pour venir au secours des chiens élevés pour être mangés dans divers pays d’Asie du sud-est, dont la Corée du Sud.

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Des fermes d’élevage de chiens destinés à être mangés

Si, pour beaucoup, l’idée que les « Asiatiques qui mangent du chien » relève de la caricature, la cynophagie est pourtant une réalité culturelle répandue dans le sud-est asiatique (entre autres). La Corée du Sud a, en l’espèce, la curieuse particularité d’être le seul pays au monde où se trouvent des élevages intensifs et industrialisés de chiens destinés à être mangés. Des lieux comparables, donc, aux élevages de porcs ou de bovins dans les pays occidentaux. D’après la fondation Change for Animals, quelque 2 millions de canidés seraient concernés, de toutes races… et même des « invendus » de l’industrie des animaux de compagnie. Ce type de «ferme » fourniraient ainsi dans l’ombre des milliers d’entreprises à travers le pays.

Le fait choque les consciences occidentales (qui ont vite oublié leurs boucheries canines du siècle dernier en plein Paris) d’autant plus fortement que le chien y est un animal familier, ce qui le distingue du porc ou de la vache, dont le sort indiffère largement. Mais les traitements infligés et les souffrances ressenties par des animaux aux capacités cognitives et sensorielles très proches, sont tout-à-fait comparables indépendamment de l’espèce. Ainsi, ces militants suivent généralement un régime alimentaire au minimum végétarien. Ainsi, parmi les divers chantiers auxquels elle se consacre, la fondation Change for Animals travaille à l’abolition légale de l’industrie de la viande de chiens dans le sud-est asiatique, à Bali et en Corée du Sud. Cette fondation a été co-fondée par Lola, combattante de toujours de la cause animale depuis son plus jeune âge : elle dit d’ailleurs être devenue végétarienne après avoir découvert l’élevage industriel à l’âge de 8 ans dans un article de presse.

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Sa passion pour les animaux a d’ailleurs déterminé son orientation professionnelle, puisqu’elle a obtenu licence en zoologie et des masters en biologie des animaux sauvages. Au sein de la World Society for the Protection of Animals (WSPA), elle a d’abord milité contre le commerce de viande de chien en Thaïlande, au Viêtnam et en Corée du Sud. Après la visite bouleversante du plus grand marché de viande de chien de Corée du Sud (Moran) où elle observe, impuissante, un homme sortir un chien de sa cage pour le tuer, elle crée en 2011, avec trois amis, la fondation Change for Animals. Son combat débute alors, auprès d’autres militants coréens de plus en plus nombreux à vouloir abolir cette pratique dans leur pays.

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La cause avance inévitablement

Comme toujours, l’idéalisme de ce combat fait sourire les sceptiques. Mais, à travers l’histoire, ils ont toujours été peu nombreux, ceux qui se sont opposés à l’horreur, jusqu’à ce que leur cause triomphe. Et les exemples abondent : l’abolition de l’esclavage des Noirs, la dénonciation du colonialisme et du racisme, l’interdiction du travail des enfants, le combat pour les droits des homosexuels, etc. Ils ne sont pas plus nombreux ceux qui aujourd’hui traitent de la question éthique animale ou parlent de « droits des animaux » en Corée du Sud. Si ceux qui aspirent à un changement profond de ce qui semble « aller de soi » s’exposent aux sarcasmes,leur cause avance inévitablement.

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C’est ainsi que, « malgré le fait de voir beaucoup d’horreurs dans ce monde », dit Lola, « je suis aussi consciente de la chance de pouvoir rencontrer et travailler avec des personnes extrêmement passionnées. C’est un privilège que je ne prends jamais comme acquis. Je crois toujours en l’être humain et l’humanité et que l’amour et la compassion vont l’emporter sur les démons de ce monde ». Et ce pari, difficile dans un monde où la cruauté semble, de toutes parts, menacer de nous engloutir, a fini par payer. « Ce qui semblait impossible a été rendu possible d’innombrables fois, et nous allons continuer dans ce sens. Nous observons tous les jours un mouvement grandissant de protection animale à travers toute l’Asie, de plus en plus de gens se sentent grandement et passionnément concernés. Nous avons déjà déplacé des montagnes, et nous allons le faire encore. C’est ainsi que nous avons banni quelques-unes des pratiques les plus barbares de l’humanité dans le passé »

En 2013, conjointement aux associations CARE et Animal Guardians, la fondation Change for Animals lance une campagne « Stop it ! » (« Arrêtez ça ! »). « La demande de viande de chien est en baisse en Corée du Sud, particulièrement parmi la population plus jeune, où la possession d’animaux de compagnie est en augmentation exponentielle. Un exemple merveilleux constitue la fermeture du restaurant le plus ancien du pays, qui a fermé ses portes en 2014 après 33 ans de service, après que les clients se soient détournés de la consommation de viande de chiens, de plus en plus considérés comme animaux de compagnie ». Par ailleurs, des « fermes d’élevage ont été fermées et des centaines d’animaux ont été sauvés d’un destin cruel – ils ont été secourus et ont commencé de nouvelles vies empreintes de liberté, d’amour et de compassion ».

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L’attitude des acteurs de cette industrie peut surprendre, car, précise Lola, qui observe des « changements stupéfiants chez ceux qui sont impliqués dans cette industrie – commerçants de viande de chien, éleveurs et propriétaires de restaurants – qui reconsidèrent leur gagne-pain et qui changent leurs opinions. J’ai rencontré de nombreux éleveurs et commerçants, pas un seul était fier de son travail, chacun a fait preuve de remords pour tous ces chiens qui ont soufferts sous leurs mains. Ils me disent qu’ils souhaitent quitter cette industrie mais qu’ils ont aussi besoin d’aide pour le faire ».

« Le changement sera plus efficace s’il vient de l’intérieur »

Le projet veut éviter tout procès d’ingérence culturelle. En pratique, un nombre croissant de Coréens réprouve ces pratiques (à l’image de Jung Myoung Sook, qui a sauvé plus de 200 chiens dans sa vie) et les acteurs locaux impliqués dans les élevages sont nombreux qui souhaitent abandonner cette activité cruelle… et illégale ! En effet, la vente de viande de chien y a été officiellement interdite en 1988 dans le pays. La fondation, estime Lola, « sait que le changement sera plus efficace s’il vient de l’intérieur, alors nous nous engageons à travailler avec ceux de l’industrie qui souhaitent en finir avec ce commerce. En montrant aux travailleurs impliqués dans cette industrie qu’il existe un chemin de sortie et en unissant nos appels au gouvernement pour qu’il soutienne la fin de ce commerce, tout en présentant des alternatives durables et viables, nous pouvons et nous allons en finir avec l’industrie de la viande de chien. »

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C’est ce qui rend aujourd’hui l’activité de Lola si efficace, une approche inclusive qui ne cherche pas à détruire une culture de l’extérieur, mais à la faire évoluer avec la volonté des coréens. « Nous travaillons toujours en collaboration avec des groupes de protection des animaux locaux et internationaux, et avec des personnes individuelles quand c’est possible, puisque nous croyons qu’un changement rapide arrive suite à un mouvement uni. Une partie essentielle de notre travail actuel consiste à venir en aide aux éleveurs qui sont prêts à arrêter leur activité et à aider les commerçants qui souhaitent quitter cette industrie avec une transition vers des commerces plus humains ». Avec ténacité, elle poursuit ce combat, tisse des relations, conduit des recherches pour permettre de libérer des chiens, de lutter contre ce type d’élevage dont l’horreur constatée fait mal : « nous avons eu beaucoup de victoires. Et chacune d’entre elles nous a donné la force de panser nos cœurs brisés et de continuer ». Un combat qui nous vaut quelques magnifiques images de libérations…


Sources : Change for Animals / Facebook Change for Animals Foundation / Interview de Change for Animals par mrmondialisation.org / Toutes photographies à la discrétion de Change for Animals

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