La ville de New York a mis en place un vaste projet de recyclage de ses anciennes rames de métro, en les immergeant à 25 mètres de profondeur au large des côtes est-américaines entre le New-Jersey et la Caroline du Sud. Un acte surprenant et des photographies incroyables qui cachent pourtant un projet écologique.

Une deuxième vie pour les rames du métro de New York

Contre toute attente c’est un projet à caractère écologique qui a vu le jour en 2001 à New-York. En effet 95% des fonds marin à l’Est des côtes Américaines sont composés de sable nu, un fond stérile de l’océan qui n’attire pas les poissons ni la vie marine. Les wagons usagés créent donc des récifs artificiels où viennent alors proliférer des formes de vie.

Né en 1904, et comptant aujourd’hui 468 stations et plus de 1300 kilomètres de voies commerciales, le métro de New York possède la plus grande flotte de rames de métro au monde avec 6325 voitures en 2013.

Début 2000, la MTA, la compagnie d’exploitation du métro new-yorkais, lance un vaste processus d’automatisation du réseau. Il est question de remplacer des dizaines de machines vieilles de plusieurs décennies, certaines datant de 1968. Plus de 2500 wagons seraient donc visés par cette politique de recyclage écologique.

fXxp3Kf Photographie : Stephen Mallon

La marche arrière des défenseurs de la nature

Les associations de défense de l’environnement étaient au départ opposées au projet. L’American Littoral Society s’était notamment prononcé contre ce projet, mais de nombreuses études ont démontré, entre temps, les bienfaits de ces récifs artificiels où les poissons, crustacés et animaux marins peuvent proliférer à l’abri des gros prédateurs et surtout de la pêche industrielle. Des déchets de la civilisation pour abriter la nature ? L’idée semble loufoque mais pourtant efficace.

Selon Jeff Tinsman, directeur du programme de récifs artificiels du Delaware, un récif de 600 wagons multiplie la population de poissons par 400.

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Suite à la rapide colonisation des récifs par les moules, crabes, crevettes et autres crustacés, les scientifiques ont observé le retour de nombreuses espèces qui étaient en voie d’extinction dans ces zones. Par exemple, le bar noir, le tautog ou le cardeau d’été.

metro-new-york-jete-ocean-3Photographie : Stephen Mallon

Le département des ressources naturelles du Maryland et le biologiste Martin Gary accusent l’industrie de la pêche d’être à l’origine de ces disparitions. Suite à ce nouveau récif, il espère à terme que les nouveaux poissons vont attirer aussi leurs prédateurs tels que le marlin, le thon ou le dauphin.

Le président de la commission de l’environnement du New-Jersey, Bradley M. Campbell, se réjouissait de voir ces centaines de rames de métro couler au fond de l’océan. Selon lui, ce projet est une formidable amélioration du système de récifs artificiels, comparés au milliers de carcasses de voitures et de chars d’assaut qui polluent les fonds marin. « C’est une victoire pour les pêcheurs du New-Jersey, une victoire pour l’économie du littoral, et une victoire pour l’environnement océanique, car nous améliorons ainsi l’habitat des poissons de façon considérable. »

Le choix de l’écologie a un prix

Certains n’y perdent pas le nord. De nouvelles espèces, c’est aussi une occasion de stimuler le nombre de pêches à la ligne locale qui est passée à 13 000 sorties par an contre 300 sorties par an avant le récif. Par ailleurs, les wagons ne sont pas coulés tel quels au fond de l’océan. Ils subissent d’abord une importante dépollution où l’on retire toutes les pièces susceptibles de flotter ou de blesser les poissons, ainsi que toute présence de PCB, d’huiles, de graisses et de lubrifiants à base de pétrole.

En tout ce projet coûterait plus de 32 millions de dollars à la ville de New York, moitié moins de ce qu’aurait couté le démembrement et l’enfouissement des rames. Mais l’intérêt écologique justifie probablement l’investissement. New York n’est d’ailleurs pas la seule ville à procéder de la sorte. Notons le cas de la Thaïlande et de ses chars d’assaut jetés à la mer, mais aussi la marine Indonésienne qui coule les navires des contrebandiers pour créer des récifs artificiels (voir article).

metro-ocean-3Photographie : Stephen Mallon

Certains doutent de l’aspect écologique

Si la plupart des associations environnementales valident le projet, quelques associations comme la American Littoral Society et Clean Ocean Action, alarment sur la présence d’amiante dans les colles et isolants restant dans les carcasses, même en faible quantité.

Des craintes que réfutent les autorités : l’Agence Fédérale de Protection de l’Environnement publie en 2002 une étude assurant que l’amiante présent dans les wagons ne présente pas de problème pour la faune et la flore aquatique, l’amiante étant naturellement présente dans les roches du plancher océanique dans des quantités proches. En outre l’amiante serait uniquement toxique pour l’Homme dans l’air. De plus, la majeure partie des isolants étant piégés dans les parois de métal, il n’y a pas de risque de contamination de l’eau.

Pourtant certains scientifiques restent dubitatifs, qu’adviendra-t-il de ces solvants et des particules de métal une fois que l’érosion et le sel auront attaqué les parois des wagons d’ici quelques années ? Si le projet paraît être une véritable aubaine pour l’environnement, certains ont des doutes quant à sa viabilité à long terme. Néanmoins, les véritables pollueurs des océans se trouvent actuellement en amont, du côté d’une industrie chimique qui peine à s’adapter à la réalité environnementale.

in-2001-the-mta-signed-up-to-participate-in-a-program-to-build-artificial-reefs-off-east-coast-statesPhotographie : Stephen Mallon

Le Stephen Mallon a penché son téléobjectif sur cette drôle de pratique dans une série nommée « Next Stop Atlantic » (prochain arrêt, Atlantique).

Le projet complet peut être vu sur le site du photographe Stephen Mallon qui l’a suivi durant 3 ans. L’artiste s’exposera également à la Kimmel Gallery à New York du 6 février au 15 mars.

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Photographie : Stephen Mallon

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Photographie : Stephen Mallon

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Photographie : Stephen Mallon


Sources : wirednewyork.com / metatv.org / huffingtonpost.fr / envi2bio.com / Reuters

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