Creuse. Alors que l’association L-PEA (Lumière sur les Pratiques d’Élevage et d’Abattage) a été invitée à l’initiative du chanteur Manu Chao à intervenir pendant le festival « EL Clandestino » qui doit se tenir les 15 et 16 juillet, Les jeunes agriculteurs Creuse et la FDSEA (23), représentant les intérêts de l’agriculture conventionnelle, ont clairement exprimé dans un communiqué de presse leur volonté de perturber l’évènement. L’association visée dénonce ces menaces ainsi que le chantage opéré par certains agriculteurs, bien décidés d’empêcher L-PEA d’informer à propos des conséquences de l’agriculture industrielle, tout en défendant le modèle d’élevage intensif.

Suite à l’invitation de L-PEA au festival « El Clandestino », Les jeunes agriculteurs Creuse et la FDSEA 23 (Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles) exposent dans un communiqué de presse leur ferme intention de « menac[er] la bonne organisation du concert si cette invitation sur scène est maintenue ». Ne voulant pas mettre en danger l’organisation du festival et gâcher le bonheur des festivaliers, L-PEA a finalement pris la décision de décliner l’invitation et s’abstenir, « connais[sant] la violence de ces syndicats et les dégradations dont ils sont capables ». Pour rappel, durant la ZAD (Zone à Défendre), du barrage de Sivens, la FDSEA s’était faite remarquer par ses agressions multiples et violentes à travers des milices organisées visant les militants écologistes. Pour autant, ils n’ont pas su faire taire cette association qui se donne pour mission de dénoncer « les grands projets agricoles nuisibles ».

Crédit Photo : L-PEA

En cause, l’opposition de L-PEA à la ferme des mille veaux

L’intervention de L-PEA devait porter sur la Ferme des mille veaux, projet industriel pharaonique faisait l’objet d’une vaste polémique en raison de son bilan environnemental et des atteintes multiples au bien être animal que provoquerait le projet. Depuis plus de deux ans et demi, explique la président de l’association Aurore Lenoir, L-PEA dénonce ce projet « par tous les moyens légaux à […] disposition ». En effet, selon la Présidente, cette entreprise d’envergure pose de nombreux problèmes. « La Ferme-Usine des 1000 Veaux, ce sont de jeunes bovins gavés de manière intensive, en hors-sol (en dehors de l’environnement naturel d’un pâturage), parqués à 15 ou 16 dans des cases, laissant à chaque animal une surface de 3m2. Les antibiotiques, bien qu’interdits en traitement préventif (depuis un peu plus d’un an), seront utilisés massivement pour contrôler les épidémies, comme l’a de suite souligné la Confédération Paysanne. Par ailleurs, la gestion des effluents est pour le moins floue et constitue nécessairement une pollution importante, en plein Parc Naturel Régional de Millevaches. »

De plus, le projet ne répond pas à l’impératif de relocalisation, rappelle Aurore Lenoir, qui fustige que « nous sommes loin de l’image de circuit court et local mise en avant ». Les bovins seront nourris à partir d’aliments en provenance d’autres départements avant d’être transportés sur plus de 500 km pour être abattus. Les importantes quantités de viande produites ne sont bien évidemment pas essentiellement destinées au marché local.

Crédit Photo : L-PEA

Bras de fer autour d’une vision différente de l’agriculture de demain

En dépit de cette réalité peu glorieuse, des agriculteurs reprochent à L-PEA d’intervenir dans le cadre d’un festival financé en partie avec de l’argent public. Les associations dénoncent un argument d’une mauvaise foi déconcertante. Les structures agricoles industrielles sont également subventionnées par l’État, pour des activités dont on peut sérieusement douter du caractère positif pour l’intérêt général ; et c’est tout particulièrement la cas de la Ferme des mille veaux où le seul impératif est de produire toujours plus. Dans ce contexte, Aurore Lenoir rappelle que la vigilance de la société civile est d’autant plus importante : « c’est l’objectif même de notre association, que les consommateurs doivent être informés des conditions d’élevage des animaux dans ce type de structures, d’autant plus lorsque celles-ci sont bâties avec des fonds publics (le projet a reçu le maximum des subventions possibles de la part de l’État, de la Région, du Département, de la Communauté de Communes locale). »

À ce jour, Aurore Lenoir regrette qu’une discussion plus constructive ne puisse voir le jour. En 2015, lorsque débutent les débats sur ce complexe industriel, les agriculteurs « ont eux-même repoussé notre invitation à un débat public ». Plus tard, souligne la présidente, les soutiens du projet se sont défendus avec une communication trompeuse, afin de donner au projet une image plus positive dans l’opinion. Pourtant, individuellement, des agriculteurs expriment aussi leur doute, rapporte l’association, mais se voient contraints de suivre l’avis du syndicat majoritaire dont l’orientation est volontairement productiviste (on rappellera qu’il n’existe pas qu’un seul mode d’agriculture et qu’il existe d’autres syndicats agricoles à ce jour minoritaires).

L-PEA estime que cette nouvelle passe d’armes expose des visions opposées de l’agriculture et de ses évolutions futures entre citoyens et entre agriculteurs eux-mêmes. Alors que la structure s’implique pour une prise en compte du bien être animal et la défense de l’environnement, « La FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles. ndlr.) a pris le parti de l’intensification de l’agriculture, que ce soit pour les cultures que pour les élevages. Pour eux, il n’existe aucun modèle alternatif. »

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Crédit Photo : L-PEA

Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation

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