Ami des animaux, l’Irlandais Patsy Gibbons a sauvé successivement trois renards d’une mort certaine… et ceux-ci l’ont adopté naturellement, devenant des compagnons de vie. Mais, loin de leur sort heureux et des regards indiscrèts, un grand nombre d’animaux sauvages subissent une souffrance quotidienne dans des élevages destinés à la fabrication de manteaux de fourrure pour les riches. Les renards en sont les premières victimes…
Originaire du comté de Kilkenny dans le sud-est de l’Irlande, Patsy Gibbons est devenu, un peu malgré lui, une sorte de héros international. Vétérinaire et amoureux des animaux (il posséderait quatre chiens et chats et de nombreux canards et poules), il découvre un jour une renarde abandonnée sur un chemin. Il lui vient en aide, la sauve et garde l’animal auprès de lui et qu’il baptise bientôt Gráinne. Son acte, pourtant simple, fait du bruit dans sa région.
Plus tard, des randonneurs, ayant découvert d’autres renardeaux abandonnés et condamnés à mourir, vont les lui remettre. À nouveau, les animaux décident de rester et l’homme les baptise Minnie et Henry. Voilà M. Gibbons entouré de trois renards qui se laissent rapidement domestiquer par leur bienfaiteur. Lui qui voulait les rendre à la nature et à leur condition sauvage, il doit vite se rendre à l’évidence : ils l’ont adopté et ne veulent pas se détacher de lui, ce qui lui a d’ailleurs valu des critiques, notamment de l’association de réinsertion à la vie sauvage d’Irlande (Wildlife Rehabilitation Ireland).
Photographie : Clodagh Kilcoyne
La situation alarmante des renards et animaux d’élevage
Ces querelles entre amoureux des animaux sont bien peu de choses si l’on considère le sort heureux des renards sauvés par M. Gibbons. Il y a quelques années, 30 Millions d’Amis attirait l’attention sur la recrudescence du commerce de fourrures d’animaux sauvages dans le monde. Loin de reculer, en dépit des efforts des associations, celle-ci progresse dans l’indifférence d’une part croissante des consommateurs. Un clip sanguinolent avait pourtant, dans les années 1980, marqué à ce point les esprits qu’il avait entraîné une chute brutale de l’activité de cette industrie (-50% aux États-Unis). Mais les mémoires sont courtes et les murs des industries ne sont pas transparents.
D’après 30 Millions d’Amis, le secteur affichait en 2009 et depuis dix ans auparavant une croissance annuelle de plus de 10%. La France à elle seule affichait, selon l’association, un chiffre d’affaires du secteur de la fourrure de 263 million d’Euros en 2006. L’Hexagone comptait une quarantaine d’élevages et sa production annuelle de peaux de renards et visons se chiffrait à quelque 280 000 produits par an. Des chiffres relativement faibles en comparaison avec ceux de pays tels que le Danemark, la Russie, la Finlande, la Chine ou les États-Unis où c’est par centaines de milliers que sont abattus les visons et renards d’élevage.
Photographie : Clodagh Kilcoyne
Les plus riches sont les plus polluants
Si l’argument de la cruauté à l’endroit d’animaux ravalés au rang de matière brute inanimée (dont une bonne partie est tuée sans que sa fourrure soit mise à profit : sur 180 animaux tués, seuls une quarantaine sont réellement utilisés) laisse beaucoup indifférents, l’argument écologique pèse peut-être davantage. De même que les élevages industriels d’animaux destinés à la consommation alimentaire en font la seconde industrie la plus ravageuse pour l’environnement, de même les élevages destinés à la production de fourrure sont désastreux sur le plan écologique.
Selon des estimations, il faudrait, une vingtaine de renards roux, 30 à 80 visons ou 150 à 240 hermines pour fabriquer un seul manteau ! Avant leur abattage, il faut donc les nourrir abondamment en viande et céréales, de sorte qu’un kilo de fourrure de vison nécessite plus d’une demi-tonne de nourriture. Or, c’est un ensemble de conséquences extrêmement polluantes qui en découlent : l’abondant lisier produit par les animaux, bien sûr, mais aussi la tannerie ou l’incinération des carcasses. Le bilan est paradoxal, la fabrication d’un manteau de fourrure serait 20 fois plus polluantes que celle d’un manteau synthétique. Et pourtant, l’industrie de la peau garde cette image faussement « naturelle » alors qu’elle est déconnecté des traditions et du vivant.
Photographie : Clodagh Kilcoyne
Au total, cette industrie cruelle et ses chiffres corroborent ce qui est un fait : pays ou individus, ce sont les plus aisés qui participent le plus à la perpétuation du secteur et apparaissent également les plus indifférents à l’environnement. Les coûts prohibitifs des vêtements de fourrure les réserve en effet à une clientèle qui a les moyens de dépenser plus de 1000€ pour un seul produit, c’est-à-dire une extrême minorité.
Illustration criante de ce qui ressemble à une règle : qu’il s’agisse de l’avion (voyage touristique ou commercial), des bijoux en métaux et pierres précieuses dont l’extraction est ravageuse sur les plans social et environnemental, des yachts privés ou des fantaisies architecturales de tout acabit, ou bien encore des industries de la consommation de masse, l’impact environnemental est indexé sur le niveau de richesse d’abord des pays (l’occident faisant partie des plus riches), ensuite des individus. Cependant, la pratique étant mondialisée, on peut également retrouver ce type de peau en doudoune des vêtements de grands chaines low-cost de l’habillement…
Photographie : Clodagh Kilcoyne
Sources : Vivre-en-Irlande.fr / 30MillionsdAmis.fr / Fourrure-Torture.com / Soocurious.com