« Marcelline l’aubergine, une aubergine bio, mais F1, hybride, donc modifiée et non reproductible (sous peine de voir sa descendance se dégénérer), a décidé de consacrer sa vie à la lutte pour la préservation des semences anciennes et reproductibles. » Le petit légume violet s’est promis, en découvrant sa situation, d’essayer de comprendre ses origines et les raisons pour lesquelles il ne peut pas se reproduire. Sylvie Bourgeois propose de suivre cette quête dans une série YouTube ludique faite de courtes vidéos de quelques minutes.

Le débat portant sur les semences paysannes ne se réduit pas une simple lutte pour la préservation de l’environnement ou des questions sanitaires. Il interroge plus largement l’image du monde que nous construisons : souhaitons-nous vraiment d’une société au sein de laquelle une poignée d’entreprises contrôlent le vivant ? L’écrivaine Sylvie Bourgeois a eu l’idée de lancer une chaîne YouTube consacrée à la question, d’une manière pour le moins originale… Elle propose d’adopter le point de vue d’une aubergine hybride de type F1, c’est à dire non reproductible, le tout dans une série vidéo à la fois informative et amusante.

Marceline, l’aubergine qui ne pouvait pas se reproduire

Marceline, vivant dans le 6eme arrondissement de Paris, s’engage dans une lutte pour la préservation des graines paysannes. Elle se rend chez divers agriculteurs, dans des jardins, et n’hésite pas à écrire au ministre de l’environnement, Nicolas Hulot, pour dénoncer la législation sur les semences en vigueur : « les cultivateurs, pour avoir le droit de commercialiser leur récolte, doivent utiliser des semences faisant partie d’un catalogue officiel établi par un groupement constitué par les cinq plus grosses entreprises agrochimiques du monde ». Or, ces dernières commercialisent essentiellement des semences hybrides, ce qui engendre un cercle vicieux (mais rentable) puisque les exploitants sont contraints à acheter de nouvelles semences tous les ans. Par ailleurs, ce système conduit à la standardisation des fruits et légumes cultivés et donc à une perte de biodiversité.

C’est contre ce phénomène de dégradation du patrimoine génétique naturel que Marceline a décidé d’entreprendre pour la préservation des semences paysannes et de la biodiversité. D’ailleurs, Marceline aurait pu elle-même faire les frais de la course à l’homogénéisation : en raison de sa protubérance qui lui fait aujourd’hui office de nez, elle a bien failli ne pas être vendue à cause de son « défaut ». Heureusement, elle a trouvé quelqu’un qui a bien voulu d’elle malgré sa différence… contrairement à des millions d’autres qui terminent dans une poubelle chaque année.

Une série « non culpabilisante »

Sylvie Bourgeois, romancière depuis 2003, avait auparavant fait une carrière dans la communication. Elle revendique sa proximité avec l’écologie de par son éducation et évoque « l’envie de sensibiliser des personnes de son entourage ». L’agriculture biologique « c’est bien », affirme-t-elle, mais il faudrait pousser le raisonnement à propos de l’origine de notre nourriture encore plus loin et s’interroger sur « les problèmes que peuvent poser les semences hybrides », que ce soit pour les producteurs, les consommateurs ou encore l’environnement. Aujourd’hui, en matière d’alimentation, il y a une tendance à réduire la question à celle du risque pour le consommateur. Avoir une vision holistique et structurelle de la situation reste rare.

Alors qu’elle avait imaginé un scénario de film à propos de la thématique très actuelle des semences paysannes, Sylvie Bourgeois a bouleversé ses plans après sa rencontre fortuite avec Marcelline. Sa nouvelle héroïne permettait de parler de cette problématiques avec « le regard ingénu, et naïf de celle qui essaye de comprendre, d’apprendre ». C’est dans cet esprit qu’elle conçoit sa série, dont la deuxième saison vient de commencer : « une transmission ludique, non culpabilisante et joyeuse, le tout dans un esprit positif ». L’objectif est de « donner au spectateur l’envie de découvrir et de comprendre », sans que les vidéos ne contiennent de « jugements ».

Les aventures de Marcelline l’aubergine sont à suivre sur YouTube et Facebook. 

Photographie à la discrétion de Sylvie Bourgeois

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Sources :  propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / youtube.com / avecsylvieonsemepourlavie.com

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