Alors que les organisateurs de festivals intègrent de plus en plus la problématique environnementale à leur cahier des charges, ce sont également les animateurs de ces évènements – restaurateurs, fournisseurs de matériel – qui se mettent en vert. À l’image de ce changement, L’usine à Patate, une friterie itinérante, culturelle et éco-responsable. Rencontre.
« La frite est une expérience commune à énormément de personne ». Ce ne sont pas nos amis belges qui diront le contraire ! Par conviction pour l’environnement et par amour pour la musique et la culture, Joséphine et Mathias se sont lancés à partir de presque rien dans une folle aventure. Eux qui « baroudaient » jusque là des Caraïbes au Portugal en passant par le Canada, vivant de petits boulots et de débrouille, sont aujourd’hui fiers possesseurs d’une friterie bio et itinérante que vous croiserez peut-être lors d’un prochain festival. Une manière de transmettre à leur tour par la pratique leurs valeurs.
Bienvenu à l’Usine à Patates
« Devenir acteur plutôt que spectateur », voilà ce qui motivait le couple, qui ne souhaite pas résumer son activité à une question de nourriture et de restauration. En effet, il s’agit également d’agir de manière positive sur leur propre vie, le monde qui les entoure, mais aussi la scène culturelle qui les inspire tant. Dans leur esprit, le changement ne viendra pas « du haut » de si tôt. Et il suffit de jeter un œil à la politique actuelle pour s’en convaincre. « Il faut que tous les petits porteurs de projet, tous ceux qui pensent demain et qui veulent essayer de faire le bien s’unissent et s’organisent pour que petit à petit les choses et les mentalités évoluent ».
Forts de leurs expériences – Joséphine est spécialisée dans les arts vivants, la coordination et l’organisation d’événements culturels, alors que Mathias a déjà eu par le passé un stand de restauration bio sur les festivals – ils décident de se lancer dans leur projet il y a un an, avec en arrière pensée l’idée de lutter contre le gaspillage alimentaire et la sur-consommation que l’on peut souvent observer dans les festivals. Dès le début, ils construisent leur projet autour de valeurs fortes et engagées. Ils « imagin[ent] alors un commerce itinérant, une formule « anti-gaspi », un stand qui ne proposerait qu’un seul produit à la vente, soumis à des exigences locales, biologiques, végétariennes et éco-responsables. Un projet qui allierait les caractéristiques de l’événementiel – cadence, densité du public et importance de l’entertainment – aux principes de bien-manger et de développement durable. »
Cependant, tout n’a pas été simple. Ainsi, la création de leur entreprise les a entraîné du « Salon créer » (événement annuel à l’intention des entrepreneurs) jusqu’à la chambre de commerce, en passant par les organismes d’aide à la création d’entreprises et les demandes de financement bancaire. Au départ, « on est rentrés malgré nous dans la spirale de la machine à fric », racontent-il avec auto-critique et honnêteté, tout en décrivant les débuts difficiles du projet. Pendant trois mois, ils essayent de « rentrer dans [le] moule », avant de finalement revenir à des bases qui correspondent vraiment à leurs aspirations. Grâce à un micro-crédit accordé par la NEF, une coopérative de finance éthique, ainsi qu’un financement participatif, ils se procurent enfin le nécessaire : camion, cuisine adaptée, matériaux de récupération… Puis « s’enchaînent alors 3 mois et demi de bricolage intensifs » pour aménager le camion et construire le stand. Cette fois-ci le projet est vraiment lancé.
Succès immédiat
Commence alors la recherche de fournisseurs, rendue délicate en raison des mauvaises récoltes en 2016. Pour les pommes de terre, ils se tournent finalement vers Biogaronne, alors que pour les sauces, ils travaillent avec Actibio. Pendant ces premiers mois, le couple ne compte pas ses heures de travail, partagées entre bricolage, prise de contact avec les organisateurs de festivals et procédures administratives. Mais, à la fin, le compte est bon : leurs premières frites 100% naturelles sont vendues à l’occasion du festival Welcome in Tziganie qui s’est tenu à Seissan dans le Gers, du 28 au 30 avril. Les frites sont cuites à l’huile végétale (tournesol) et présentées, selon le format, dans du papier kraft ou du carton recyclables. « C’était juste fou de voir se concrétiser ces 9 mois de travail riches en émotions et en fatigue » soufflent-ils, à la fois soulagés et ravis.
D’autant que Joséphine et Mathias peuvent se féliciter du succès rencontré lors de leurs premiers rendez-vous. Leur démarche intrigue et suscite l’attention, « ce qui a permis de très beaux échanges et discussions sur l’agriculture bio, les moyens de changer les choses, les initiatives possibles à notre échelle, les valeurs humaines à défendre ». Pour l’avenir, ils ont déjà pleins d’idées derrière la tête : cultiver leurs propres pommes de terre bio, travailler avec des personnes « en insertion », développer des cultures locales et bio, ouvrir un lieu culturel et éco-responsable. Dans l’immédiat, ils sont encore à la recherche de producteurs locaux de pommes de terre bio avec lesquels travailler et poursuivent leur aventure en France et au delà, notamment au Portugal. Dans les prochaines semaines, il sera possible de leur rendre visite au MADE festival Rennes ou au Download Festival à Bretigny sur Orge près de Paris. Pour y goûter, pour les plus gourmands, à leur « mètre de frites », accompagné d’une sauce maison. Bon appétit !
Sources : Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / facebook.com / lusineapatate.com