Un jeune sahraoui a trouvé tragiquement la mort à Agadir, au Maroc, en février dernier. Un décès survenu dans des conditions troubles, impliquant les autorités marocaines sur fond de haine ethnique. Takbar Haddi, la maman du jeune garçon, est en grève de la faim depuis un mois dans l’espoir de justice et pour retrouver le corps de son fils aux mains du pouvoir marocain. Clément Burelle, journaliste indépendant, s’est rendu auprès de cette maman pour recueillir son témoignage.
Le Sahara Occidental, ancienne colonie espagnole, n’a pas véritablement de statut depuis 1976. Depuis le départ des espagnols, les sahraouis, qui réclament l’indépendance, sont en conflit avec les autorités marocaines qui revendiquent la paternité du territoire. Aujourd’hui, de nombreux réfugiés sahraouis seraient persécutés et emprisonnés par les autorités marocaines, comme l’a dénoncé notamment Amnesty International à plusieurs reprises (source).
C’est dans ce contexte tendu que s’inscrit l’histoire de Takbar Haddi, une sahraoui résidente aux Canaries (Espagne) qui a débuté une grève de la faim il y a maintenant plus d’un mois. Âgée de 41 ans, cette mère de famille s’est installée dans les rues de Las Palmas de Gran Canaria (Espagne) face au consulat marocain. Elle se dit être déterminée à « aller jusqu’au bout si nécessaire » afin de dénoncer le malheur qui frappe sa famille. Cette dame réclame le corps de son fils, Haidala Mohamed Lamin, décédé le 8 février à l’âge de 21 ans à Agadir (Maroc) dans d’étranges conditions.
L’agression s’est déroulée devant l’épicerie familiale, à l’Ayoun, capitale du Sahara occidental. 5 jeunes locaux auraient provoqués l’altercation. Selon les témoins, quand Haidala tente de prendre la défense de sa tante, il reçoit plusieurs jets de pierres et un coup de ciseau dans la gorge. Après avoir été emmené devant un médecin et recousu sans aucune analyse supplémentaire, Haidala fut accusé de résistance aux autorités et de désordre sur la voie public par la police marocaine. Durant 48h, il fut emprisonné sans soins supplémentaires.
À son retour, sa famille va constater de nouvelles traces de blessures. De nouveau, le jeune homme fut emmené aux urgences et puis transféré à l’hôpital d’Agadir. Durant 5 jours, il fera l’objet de multiples opérations et la famille sera dans l’impossibilité de le voir. Le 8 février, sa mère apprend le décès de Haidala par téléphone et se rend le lendemain même à l’hôpital d’Agadir. Mais ni elle, ni aucun membre de la famille n’ont été dans la possibilité de voir son corps jusqu’à aujourd’hui. Du jour au lendemain, le jeune homme à tout simplement disparu de leur vie. C’est cette situation douloureuse qui a poussé cette mère de famille à entamer une grève de la faim en campant face au consulat marocain.
De leur côté, les diplomates marocains affirment être aptes à rendre le corps du jeune homme à la seule condition que l’autopsie soit signée avant remise du défunt. Mais Takbar Haddi ne fait pas confiance à l’autopsie réalisée à l’hôpital. En signant ce document, elle accepterait l’impossibilité d’établir la vérité sur ce décès par le biais d’une autopsie indépendante. Takbar estime qu’il s’agit d’une crime ethnique effroyable dont son fils ne serait pas la seule victime. « Ils n‘ont pas traité Haidala avec dignité, seulement parce qu’il était un sahraoui, ses plaies n’étaient sur le moment pas grave au point de mourir, ils l’ont laissé mourir volontairement » déclare-t-elle, se référant à près de 13 cas similaires qui ont eu lieu en moins de 5 ans concernant la communauté sahraouie.
Cette mère de famille désespérée avait commencé sa lutte seule, au coin d’une rue. Désormais, elle est soutenue dans sa démarche par de plus en plus de personnes et de collectifs espagnols jusqu’à atteindre une portée internationale. Au quotidien, des manifestations sont organisées face au consulat marocain qui reste dans le silence et refuse de s’exprimer. On observe cependant une certaine récupération politique de la part de différents partis espagnols (Union canarias, PSOE,…) mais aussi et surtout par le front indépendentiste saharaui Polisario. Même si ce triste cas est certainement le reflet d’une injustice récurrente au Sahara Occidental et invite à s’interroger sur la situation d’un territoire « dans le flou » depuis trop d’années, ce parti indépendantiste n’hésite pas à surfer sur cette affaire pour mettre en avant leur politique, quitte à atténuer la portée des revendications de Takbar.
Déjà hospitalisée à deux reprises, l’état de santé de cette maman endeuillée se détériore de jour en jour. Takbar se dit prête à aller jusqu’au bout. Aujourd’hui, cela fait près d’un mois que Tarbak Haddi effectue sa grève de la faim, mais jusqu’à ce jour, aucun dialogue avec la diplomatie marocaine ne fut ouvert et elle ne reçoit aucun soutien dans sa démarche de la part du gouvernement espagnol actuel.
« Je souhaite que le cas de mon fils soit le dernier, ce sera le dernier saharaui mort pour être saharaui…». Vous pouvez soutenir Takbar Haddi dans sa démarche en signant cette pétition. Le Hastag #justiciaparaHaidala est également de rigueur.
Clément Burelle pour Mr Mondialisation
Sources : elmundo.es / abc.es / politica.elpais.com / westelijkesahara.org