Après avoir traversé la France pour partager des semences paysannes et encourager leur transmission, Bastien, jeune trentenaire vivant en Bretagne, part deux mois au Québec entre août et octobre prochain pour y reproduire son expérience. Pour réaliser son projet, il lance un appel à dons de semences paysannes locales.
Un « pèlerin de la graine » ? On se demande bien ce que cela peut être. Une nouvelle religion ? Non ! « C’est une manière de voyager en utilisant les graines comme monnaie d’échange et en prônant le partage et la simplicité », explique Bastien, à l’origine du projet « Le Pèlerinage de la Graine ». Sur son chemin, il participe à la création de jardins et potagers, avec comme volonté de mettre en lumière les semences paysannes françaises et du monde entier avec pour rêve « d’avoir un jour une carte du monde avec des milliers de jardins comestibles ».
Les semences paysannes sont des variétés issues directement de la production des agriculteurs et qui ne proviennent donc pas des semenciers ou d’une modification en laboratoire, font aujourd’hui l’objet d’une véritable lutte idéologique. Certains, comme le Réseau Semences Paysannes, encouragent leur promotion et veulent faciliter leur échange, notamment pour offrir une plus grande autonomie aux paysans et remettre au cœur de leur travail millénaire de sélection, qui a longtemps fait partie intégrante de leur métier. Mais aujourd’hui, l’essentiel des semences utilisées par les agriculteurs sont des hybrides sélectionnés par des semenciers (3 multinationales contrôlent 55 % du marché) pour leur productivité ou leur caractère commercial (forme, couleur,…).
Les semences paysannes « sont un trésor de notre patrimoine commun »
En 2016, Bastien a parcouru 800 kilomètres sur les routes de France, entre Chartres en Eure-et-Loire et Marignac-en-Diois dans la Drôme. Pendant son périple, il a participé à la création de 34 jardins à partir des graines qu’il offrait à des habitants et associations, dessinant un vaste « chemin comestible » à travers l’hexagone. Les semences lui servaient également de monnaie d’échange pour se nourrir. C’est ainsi qu’il a traversé une grande partie du pays sans un sous dans la poche, en s’appuyant uniquement sur la réciprocité et l’échange. « Ça a été une expérience incroyable et magique au cours de laquelle j’ai pu constater la générosité des Français », se souvient-il avec enthousiasme.
C’est il y a cinq ans que ce « passionné du monde du vivant et de la permaculture » s’intéresse pour la première fois à la question des semences paysannes. Il découvre alors le « miracle des semences, ces petites choses qui en quelques mois nous offrent fruits, légumes et fleurs et sont la base de notre autonomie alimentaire ». Depuis, il s’engage à son échelle pour protéger et préserver ce « trésor de notre patrimoine commun » comme il le nomme.D’abord grâce au pèlerinage de la graine, puis par l’intermédiaire de l’association qu’il crée à son retour de voyage, « Semeur de bonheur ». La structure, axée sur l’échange de savoirs et de savoir-faire, propose notamment une grainothèque et dispense des premiers cours d’introduction à la permaculture.
Prochaine étape, le Québec
Le voyage, Bastien y voit non seulement une manière de s’ouvrir sur les autres, mais aussi une opportunité pour se découvrir soi-même, s’instruire : « marcher, c’est l’occasion de se changer et de prendre conscience de ce qui existe autour de nous ». Pendant son voyage à travers la France, il a vu de ses propres yeux les paysages agricoles défiler, souvent en monoculture et aspergés de nombreux produits. Ses convictions et son regard pessimiste qu’il portait alors sur le modèle agricole dominant s’en sont vus renforcés. « L’agriculture moderne est un carnage, tant sur le plan humain qu’environnemental. Les agriculteurs ne consomment pas ce qu’ils se produisent, subissent des pressions financières importantes et ne savent plus cultiver sans produits chimiques » analyse-t-il.
Pas de quoi le décourager pour autant : d’ici quelques jours, il partira au Québec, d’abord pour assister à l’École d’été sur l’agriculture urbaine à Montréal, puis pour traverser le pays, à la découverte de la culture et afin de partager des semences (vos semences?) pendant son aventure. Il souhaite ainsi continuer à encourager le partage et l’échange. Si vous résidez au Québec et que vous produisez vos propre semence, vous pouvez d’ailleurs le soutenir dans sa démarche en lui faisant don de quelques graines.
Pour plus d’informations et lui apporter votre aide, rendez-vous sur sa page Facebook.
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