La lutte pour les droits des femmes, c’est toute l’année. Mais le 8 mars reste une occasion idéale de sensibilisation à travers quelques rappels encore trop peu évidents. Retour sur un peu plus d’un an de nos articles et reportages sur la lutte féministe qui permettent d’en saisir l’urgence et d’enfin oser la rejoindre.
En 1977, l’ONU fait voter une journée internationale et commune de célébration des droits des femmes. Le but ? Absolument pas d’offrir des roses, mais bien de sensibiliser et de se mobiliser autour des questions d’égalité entre les femmes et les hommes. C’est aussi une journée de bilan : il s’agit de faire le point sur les avancées et les reculs concernant la place des femmes dans la société.
Échauffement : dépasser la rupture pour pouvoir rejoindre la réflexion
Si cette problématique de rapports remue énormément notre siècle, bouleversant simultanément nos idées préconçues, habitudes, repères familiers, constructions sociales, paysage culturel, ordre moral et autres systèmes de pensée avec lesquels une majorité d’entre-nous a grandi : c’est en réalité, et paradoxalement, pour le meilleur.
En effet, une crise, aussi conflictuelle ou douloureuse soit-elle, est constructive à terme car elle oblige le corps citoyen à repenser ses rapports de domination internes dont la défaillance est restée (trop) longtemps invisible. Or, bien qu’une partie du monde n’en ressent pas les effets, ou pas tant directement, cette défectuosité s’avère bel et bien malsaine et délétère pour la seconde.
La crise du patriarcat est ainsi une chance pour les personnes privilégiées par un modèle de société de conscientiser leur position et de revoir leur vision, voire de faire le deuil de certains passe-droits, en faveur des groupes sociaux qu’elles contribuent, consciemment ou non, à opprimer. C’est, comme dans toute relation humaine, une étape vitale de reconsidération de l’autre lésé et, ce, à la faveur d’une cohabitation des êtres qui soit pérenne. Et si, de fait, cette remise en question est laborieuse et insécurisante, pétris de bienveillance et d’humilité, nous sommes capables collectivement de la traverser avec succès.
Alors, bien sûr, le 8 mars ne permet aucunement de résoudre nos traumatismes, ignorances et préjugés hérités d’une histoire particulièrement misogyne. Et le 8 mars n’est pas non plus suffisant à réconcilier instantanément les réactants avec les réflexions philosophiques, éthiques et militantes en cours qui constituent un réseau de pensée foisonnant à propos des blessures d’hier et de nos relations de demain.
En revanche, le 8 mars est une bonne occasion de revenir sur une année de colères féministes saines et de luttes de terrains qui ont à la fois veillé à la conservation des acquis durement obtenus par nos anciennes et anciens, et à la fois travaillé à l’amélioration et la précision d’une égalité tantôt inexistante, tantôt inaboutie.
Une égalité pourtant précieuse – même si nous revenons historiquement de loin et qu’elle n’est pas encore toujours évidente pour toutes et tous. Car elle est un rempart contre les nombreux préjudices chiffrés que représentent les féminicides, les violences conjugales ou non, les agressions sexuelles mais également toutes ces discriminations quotidiennes qui forment la vie de la majorité des femmes (suffisamment majoritaire pour que le consensus sociologique qualifie le phénomène de systémique, et pour considérer que l’exception confirme simplement la règle).
Comment contribuer à cet élan de justice, quel que soit son genre ? D’abord en s’informant, en faisant face à la réalité plutôt qu’en y projetant ses biais de façon précipitée. C’est un temps long qui nécessite de l’humilité, mais un temps nécessaire et enrichissant. Puis en poussant notre réflexion via des analyses approfondies de la situation. Et, enfin, en rejoignant intuitivement les luttes dont la cause aura fini par nous préoccuper. Tour d’horizon de la lutte des droits des femmes de cette dernière année, à travers nos reportages d’actualité et dossiers de fonds.
18 articles et reportages sur les luttes féministes pour mieux les soutenir
#1 : « Comment notre perception de la Virilité génère de la violence envers les femmes »
Alors que la parole des femmes se fait entendre et que les violences dont elles sont victimes se sont récemment imposées dans le débat public, on peine encore à analyser l’implication des hommes dans cette violence… (Lire la suite de l’article)
#2 : «Nous Toutes contre les violences sexuelles sur les enfants »
L’omerta qui pèse sur les violences sexuelles faites aux enfants et l’impunité des violences faites aux femmes ont beaucoup en commun ; c’est d’ailleurs le hashtag #MeToo qui a permis la naissance d’un #MeTooInceste… (Voir le reportage photo)
#3 : « #MeTooInceste : la fin d’un vieux tabou ? »
Ces deux formes de violences que sont les agressions envers les enfants et envers les femmes prennent en effet source au sein d’un même patriarcat très ancré dans l’éducation culturelle. Un apprentissage sociétal qui, depuis petit, encourage encore trop souvent les garçons à se sentir plus tard permis et légitimes d’emprise sur autrui. Et la loi n’est pas étrangère à cet état de faits puisque les droits des enfants (1959) et ceux des femmes (1791- 2022) sont tous deux extrêmement récents au regard de l’histoire humaine, et étaient autrefois en France tous deux également sous l’autorité des chefs de famille… (Lire la suite du dossier)
#4 : « 27 femmes contre PPDA : cas d’école d’une Culture du Viol insupportable »
A travers cette affaire de grande ampleur – plus de 20 femmes ont dénoncé l’ex-star du PAF – nous retrouvons un schéma tristement bien connu : celui de l’impunité d’une figure célèbre renforcée par la culture du viol : “tout le monde savait”, mais personne n’a osé parler. De PPDA à la Culture du Viol en France… (Lire la suite du dossier)
#5 : « Mobilisation pour défendre le droit à l’avortement menacé dans le monde »
Paris, Lyon, Bordeaux, Toulouse : ils et elles ont tenu à lutter contre la remise en question du droit à l’avortement qui semble traverser les pays du monde, un à un… (Voir le reportage et/ou lire aussi « Interdiction de l’IVG en Pologne : les conséquences désastreuses »)
#6 : « Amazonie : au cœur du combat vital des femmes autochtones »
Saviez-vous que 5% de la population mondiale protège aujourd’hui 80% de la biodiversité de notre planète ? Les peuples autochtones, véritables gardiens de l’environnement, se heurtent pourtant aux injonctions économiques et politiques d’une société qui a perdu son lien primaire à la Nature. Afin de mettre en lumière le combat écologique et social des femmes issues de ces communautés,… (Lire la suite de l’article)
#7 : « #MeTooThéâtre à l’entrée de la cérémonie des Molières »
En mai 2022, il était convenu que deux comédiennes, engagées pour la libération de la parole concernant les nombreuses affaires d’agression sexuelles et de viols dans le milieu du théâtre, présentent un discours sur scène pour briser l’omerta, mais la direction des Molières a eu à redire sur… (Lire la suite)
#8 : « Chili : À quand la révolution féministe, écologique et sociale ? »
Le dimanche 4 septembre 2022, le projet d’une nouvelle Constitution, progressiste, féministe, écologique et sociale, a été rejeté par 62% des votes. Ce sont près de 7 millions de votes « non » qui ont décidé du destin des 18 millions d’habitant·e·s du pays… (Lire la suite de l’article)
#9 : « #MeTooPolitique contre le système de domination et d’impunité de la sphère politique »
Les violences sexistes et sexuelles sont légions en politique, à tel point qu’on ne parle plus de cas isolés mais bien d’un appareil d’ampleur systémique : l’emprise et la domination sont inhérentes aux principes qui régissent ce monde de pouvoir, jusqu’à un sentiment de droits absolus sur l’intimité d’autrui, à disposition de toutes les volontés… (Visionner le reportage vidéo)
#10 : « La combattante : cette femme qui a dédié sa vie aux autres »
Cette femme de 90 ans, ethnologue spécialiste du Darfour, met sa retraite et le savoir de toute une vie à disposition de celles et ceux qui sont en suspens, en péril, en jugement d’être ; ces demandeuses et demandeurs d’asile exclus dont la part féminine est particulièrement malmenée… (Lire la suite du portrait)
#11 : « #NousToutes dénonce le 101ème féminicide »
Face au Panthéon, en octobre 2022, 101 femmes arboraient chacune en silence une pancarte sur laquelle étaient inscrits le prénom et l’âge de chaque victime. Sur d’autres pancartes, on pouvait lire « Aimer ne signifie pas tuer »… (Voir le reportage)
#12 : « Contre la récupération raciste des luttes féministes »
« Nous marcherons pour porter un féminisme populaire antiraciste, en rupture avec le féminisme d’Etat […] Nous marcherons pour mettre au centre des débats : nos combats, nos réparations et nos victoires! ». Le féminisme est une résistance du vivant opprimé, une lutte sensiblement transversale qui peut être holistique contre l’exploitation d’autrui, en restant sociale, écologique, antiraciste, décoloniale et inclusive… (Voir le reportage)
#13 : « Journée Internationale contre les Violences faites aux Femmes et aux Minorités de genre »
« Nous pouvons reprendre le pouvoir sur nos corps et sur nos vies en luttant ensemble pour faire entendre nos voix et les voix de celles et ceux qui ne sont plus là. Le temps du recueillement est fini : nous voulons être vivant·es et libres ! »… (Voir la suite du reportage)
#14 : « Afghanistan : la condition des femmes s’aggrave »
Fiona est une femme australienne qui informe, dès qu’elle le peut, sur la cause Hazara, une communauté particulièrement persécutée par les talibans en Afghanistan, ayant migré en grande partie en Australie. Elle revient sur l’urgence en 2023 de la situation pour toute la diaspora afghane dans le monde et pour les femmes Hazara… (Lire l’interview)
Lire aussi Nafisa Amini, activiste pour les droits humains en Afghanistan et Ces femmes qui défient les talibans au péril de leur vie
#15 : « Une « chorale » pour dénoncer l’impunité des violences sexistes et sexuelles »
En France, moins de 1% des viols aboutissent à une condamnation. En France, alors que chaque année 213 000 femmes subissent la violence de leur conjoint ou ex-conjoint, 80% des plaintes pour violences conjugales sont classées sans suite. Parmi les femmes assassinées en 2019, 65% avaient saisi la police ou la justice. « Laissez faire la justice »… sauf que l’appareil judiciaire et juridique qui constitue la justice, lui aussi, est imprégnée d’une culture patriarcale qui dévalue la parole des victimes, les culpabilise et protège les agresseurs… (Visionner le reportage)
#16 : « La mort de la jeune Mahsa Amini en Iran »
« Femmes, vie, liberté ! », le slogan des manifestations en Iran, issu de la révolution féministe et autonome kurde du Rojava, a largement été scandé pour dénoncer la mort de la jeune Mahsa Amini, arrêtée par la police des mœurs iranienne pour infraction au code vestimentaire du pays … (Voir la suite du reportage)
NB : Attention aux amalgames, le voile, comme tout symbole, connaît des mutations de sens selon les pays qu’il a traversés et son évolution en leur sein, mais également selon les femmes qui le portent. Il est impossible de le réduire à une seule signification. Pour compléter sa vision, écoutons directement les concernées en France qui répondent aux clichés les plus courants, sur France Tv Slash.
#17 : « #NousToutes pour constitutionnaliser le droit à l’IVG »
« N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » – Simone de Beauvoir… (Visionner le reportage Vidéo)
#18 : « Les questions à se poser en tant qu’homme pour mettre un terme aux violences sexuelles »
On ne le dira jamais assez, mais les violences sexistes et sexuelles sont encore trop présentes dans notre société aux relents patriarcaux et où la culture du viol reste bien ancrée, quoi qu’en dise les masculinistes et la réactance. Ce texte, s’il s’adresse plus particulièrement aux hommes hétéro, nous concerne donc toutes et tous…. (Lire la suite de la Tribune)
Bonus : l’histoire vraie de Maureen Kearney, lanceuse d’alerte détruite par Areva, est actuellement au cinéma et raconte l’enfer d’une femme opprimée à la fois par le système industriel, le pouvoir politique et la justice, jusque dans sa chair….
Conclusion positive
Il y aurait encore tant à dire et à lire et nous sommes de toute façon très loin d’avoir fini de discuter les contours de la question féministe, mais aussi grande que soit la tâche qui attend notre société, celle-ci est primordiale pour s’assurer un avenir serein dans lequel la moitié de l’humanité n’est plus abusée à cause de sa condition d’être, et où les oppresseurs se libèrent eux-mêmes de ce rôle destructeur. Un avenir qui accepte volontiers la remise en question et qui permette le processus de réparation des victimes d’abus.
Alors on se retrousse les manches, on évince la crainte de la déconstruction dont d’aucuns aiment faire un épouvantail, et on avance en faveur de relations au monde et aux autres plus dignes et respectueuses.
– S.H.
Poursuivre sa réflexion avec les excellents épisodes de l’émission Étiquette signée France tv Slash, ou l’écoute du très qualitatif et bouleversant Un Podcast à soi sur Arte. Et parcourir d’autres domaines avec les démonstrations scientifiques de Scilabus sur l’écriture inclusive, ou l’analyse de Sabine sur les nouvelles injonctions produites par les réseaux sociaux.
Merci à notre reporter Tiphaine Blot pour ses photos et vidéos de terrain, ainsi qu’à toutes les rédactrices derrière Mr Mondialisation qui constituent la majorité de l’équipe et font preuve d’une sororité bienveillante à toute épreuve, mais également à tous nos rédacteurs solidaires, concernés et attentifs.
