Cela fait deux ans que Hélène Legay et Benoit Cassegrain, à bord de leur camion aménagé, réalisent une web-série documentaire composée d’épisodes de 5 min sur des initiatives solidaires, positives et originales. Pour leur 8e épisode, ils ont rencontré Daniel Testard, un boulanger atypique et très inspirant…
Daniel a commencé à faire du pain quand il avait 3 ans. Apprenti, puis ouvrier, il a tout abandonné à 24 ans car il ne trouvait pas le temps de s’épanouir. « J’ai connu le goulag de la boulange », explique-t-il. Il voulait être plus proche de sa famille, produire sa nourriture, avoir du temps pour lui, écrire, faire de la musique… Son fournil, accolé à la maison où vit sa famille, le lui permet aujourd’hui : « Je regrette infiniment qu’on ait tranché en saucisson toutes les parties de notre vie : le travail, la vie familiale, la vie culturelle, alors que la vie ne fait qu’un. Séparer les choses comme ça, c’est les rendre artificielles ». Il a appris à se contenter du nécessaire et a réussi, en dosant travail et détente, à vivre en semi-autarcie et à être heureux et libre. Une pratique qu’il met en œuvre depuis 30 ans, à Quily, dans le Morbihan.
Après une pause de 7 ans comme assistant social qui lui a permis de faire de nombreuses recherches sur le métier de boulanger, il est revenu à son métier-passion en le revisitant complètement ! Il a décidé de consacrer deux jours par semaine à la fabrication de son pain, ni plus ni moins, pour pouvoir s’occuper de son jardin, pratiquer le chant et la musique, écrire, méditer... A la place de la vente directe, il a ouvert son fournil à ses clients qui viennent chercher leur pain quand ils le souhaitent. Ceux-ci paient directement leurs achats dans une corbeille, en toute confiance. Les gens peuvent venir quand ils veulent, ce qui lui fait gagner deux jours de liberté par semaine. Son fournil est aussi un lieu de vie et de rencontres, la plupart des ses clients sont devenus des amis.
Pour ses farines, il refuse de se soumettre au catalogue européen des semences qui interdit l’usage des plants qui n’y sont pas inscrits et considère comme illégal de vendre les fruits ou les légumes que nos ancêtres ont mangés pendant des millénaires. Daniel produit 1/3 de son pain avec des blés anciens et plante dans son jardin des variétés anciennes de nombreuses céréales et légumes dont il offre les graines à ceux qui sauront en prendre soin.
« Je suis hors-la-loi et fièrement hors-la-loi. Je le dis, même dans les journaux, parce que c’est absolument criminel d’avoir massacré ces blés et toute la biodiversité ». Il récupère aussi l’eau de pluie qu’il filtre et incorpore aux farines de blé. Enfin, il utilise un levain naturel, une recette retrouvée dans un livre du 17e siècle, qui permet au pain de se garder bien plus longtemps.
Son jardin, qui nourrit toute sa famille, est une alliance de fleurs et de légumes en tous genres. Il est régulièrement visité par des écoles ou par ceux qui le souhaitent durant les journées portes ouvertes. La transmission et le partage sont en effet essentiels à ses yeux : « Une vie d’expérience, une profession, devrait être transmise en permanence« . L’homme a d’ailleurs créé, avec d’autres boulangers de la région, une école où les apprentis artisans découvrent différentes manières de travailler. Il pratique aussi l’astrologie humaniste, discipline qui ne cherche pas à prédire l’avenir mais à mieux se connaître. Sans oublier ses écrits, liés à ses réflexions, ses apprentissages ou ses découvertes. Et, tous les étés, pendant deux mois, Daniel part à la rencontre d’autres manières de voir la vie et de la vivre.
« J’ai l’impression d’avoir travaillé pour demain ». Il ajoute : « Seul notre quotidien, dans ses gestes anodins, est capable, je le crois, de changer ce qui est nécessaire, pour ne garder que le meilleur de la beauté sur terre. ». Une belle manière d’interroger nos choix dans une société qui semble si souvent ne pas nous en laisser…
Si ce type d’exemple inspirant de changement vous interpelle, n’hésitez pas à retrouver l’ensemble des épisodes sur www.side-ways.net !
« Je suis fièrement hors-la-loi »
Sources : side-ways.net / bastamag.net / sacreschants.com