« Suspendu sur les hauteurs de Mexico, cet ovni architectural semble hors du temps. Primitif ? Futuriste ? En tout cas, avec ses audaces formelles douces et confortables, idéal pour une vie de famille. »

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De l’extérieur, la Casa Tiburon ressemble à un requin. La majorité de l’espace est enfouie sous terre.Texte et réalisation Paola Moretti, photos Mauri Pini.
Le projet de Javier Senosiain Aguilar ? Construire un univers adapté au corps humain, une maison où il n’y aurait que des surfaces courbes car elles sont « les mieux adaptées aux besoins de l’homme ». L’architecte évoque, à propos de cette maison qu’il habite depuis la fin des années 1980 avec sa famille, le ventre maternel, la caverne des hommes primitifs, l’architecture vernaculaire, les igloos…
C’est une maison souterraine qui doit son nom, Casa Tiburon, à sa protubérance extérieure, semblable à un requin noir (tiburon en espagnol). À la base, Javier Senosiain Aguilar a modelé une structure en filet métallique – support souple adapté aux effets vallonnés – qu’il a ensuite recouverte de ciment puis d’un épais manteau de terre tapissé de pelouse. Les arbres et les buissons ont été plantés pour que la maison reste fraîche l’été et conserve la chaleur de la terre l’hiver. Tout un programme qui garantit une température idéale et purifie 365 jours sur 365 un peu de l’air de Mexico. Sous la terre donc, un labyrinthe de tunnels, couloirs et d’escaliers mène aux différentes pièces. On a l’impression, étrange et accueillante à la fois, de rentrer dans le ventre maternel après être descendu au plus profond – trois mètres exactement – des méandres anatomiques, tels des conduits ou des artères. L’idée d’origine est celle d’un coquillage, un nautile précisément, déroulant ses espaces le long d’une spirale. Pas de véritables parois ; tout est lisse et rond, baigné d’ombres diverses et variées qui évoluent avec la lumière. Mais nul risque non plus de claustrophobie : de larges hublots aux vitres opalescentes colorées – inspirées par Gaudí – sont là, comme des yeux grands ouverts sur l’extérieur. La maison se répartit en trois zones : d’un côté, le living avec salle à manger et cuisine, de l’autre la chambre à coucher des propriétaires, la bibliothèque et le bureau avec terrasse, et enfin les chambres des filles, des invités et les pièces « techniques ».  Les tons pastel des murs et des tapis de ce délire en spirale ont beau transmettre une certaine sérénité, on s’y sent presque en transe. Comme lorsque l’on contemple l’impressionnante mégapole mexicaine à travers la grande fenêtre du bureau surélevé. Là, on se trouve cette fois dans la gueule du requin. L’eau, le ciel, la terre, l’air : ici tout est affaire d’éléments, tant la maison est conçue comme un refuge de méditation où les énergies jouent avec notre perception pour nous plonger dans un état second. Étagères sinueuses, lits et tables à spirale, même les rares meubles ont ici été conçus pour éviter le moindre angle vif et fluidifier les mouvements, comme pour protéger cette bulle des forces maléfiques. Dans la cuisine, un périscope permet d’examiner les visiteurs attendant au portail, c’est dire.

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