Une nouvelle étude [1] conduite par le centre britannique d’expertise pour les eaux (CREW) révèle que le changement climatique anthropique est à l’origine d’une hausse rapide et importante de la température de l’eau des lochs et réservoirs d’eau douce écossais. Cette hausse des températures risque de considérablement dégrader la qualité de l’eau de ces écosystèmes vitaux, et provoquer une prolifération d’algues nuisibles, menaçant la biodiversité locale, l’approvisionnement en eau douce, et l’ensemble des activités agricoles et touristiques du pays. L’Écosse serait-elle à l’aube d’une future crise de l’eau ? Pour la prévenir, cette étude rappelle l’urgence de répondre sans délai à la crise climatique.

Un nouveau rapport révèle que l’eau des lochs, lacs très allongés caractéristiques de l’hydrographie écossaise, et des réservoirs d’eau douce en Écosse a subi un réchauffement rapide et étendu dû aux conséquences négatives du réchauffement climatique.

Entre 2015 et 2019, 97% des lochs et réservoirs écossais ont subi une augmentation de leur température, 88% ayant enregistré un réchauffement de 0,25 à 1°C par an. Plus alarmant, la température de 9% d’entre eux a augmenté de 1 à 1,3°C par année au cours de la même période.

« Cette nouvelle étude démontre, pour la première fois, que le changement climatique réchauffe déjà les lochs et réservoirs en Écosse, et que cette tendance va très probablement se poursuivre »[1], a déclaré Linda May, écologiste spécialiste des eaux douces au centre britannique de l’écologie et de l’hydrologie.

Rannoch Lande, Ecosse – Pixabay

Un risque majeur pour la santé de ces écosystèmes

L’étude rapporte que les eaux du sud et de l’Est de l’Écosse sont actuellement les plus impactées. Toutefois, cette augmentation des températures affectera l’ensemble des régions du pays d’ici 2040.

Les risques pour la santé de ces écosystèmes sont multiples. De manière générale, les scientifiques préviennent que le réchauffement des températures de l’eau et les modifications du régime des précipitations associées au changement climatique augmentent les risques de développement d’algues nuisibles, qui se substituent à d’autres espèces végétales existantes et produisent des toxines pouvant affecter tant la biodiversité locale que la santé humaine.

Selon ce rapport, les températures moyennes de l’air d’avril à septembre devraient augmenter d’environ 2,5°C entre 2020 et 2080. Par ailleurs, il met également en garde contre les effets à long terme de la multiplication des vagues de chaleur extrême, résultant en une hausse considérable de la température de l’eau sur une courte période.

« Ces phénomènes sont susceptibles de pousser les systèmes aquatiques au-delà des limites de leur résilience, menaçant ainsi leur biodiversité et les avantages connexes qu’ils procurent à la société »[2], avertissent les auteurs de l’étude.

Outre les conséquences négatives sur la sauvegarde de ces écosystèmes, d’autres études suggèrent que cette hausse des températures impacte déjà la biodiversité écossaise, dont particulièrement de nombreuses espèces d’insectes.

Ephémère – Flickr

À cet égard, Craig Macadam, directeur de la conservation de l’ONG BugLife, rappelle que des études révèlent que les populations des éphémères d’été des hautes terres, indicateurs d’une eau saine et de bonne qualité, migrent vers des altitudes plus élevées depuis 2012 pour échapper à la hausse des températures de l’eau des lacs écossais.

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« Nous pouvons commencer à aider cette espèce et d’autres en ombrageant les petits cours d’eau, en fournissant un flux d’eau fraîche dans nos rivières et lochs pour protéger notre faune, nos approvisionnements en eau et les nombreuses opportunités touristiques qui dépendent des eaux douces de l’Écosse »[3], a-t-il notamment déclaré.

 

L’urgence des actions climatiques

Afin d’altérer les effets de la hausse des températures, les auteurs de l’étude ont formulé un certain nombre de recommandations, et prévoient également d’effectuer de nouvelles recherches pour mieux comprendre les effets du changement climatique sur le fonctionnement écologique complexe des lochs et des réservoirs d’eau douce écossais.

Ainsi, le rapport recommande de réduire la quantité de phosphore et d’azote, principaux moteurs de la prolifération des algues nuisibles, qui pénètrent dans ces écosystèmes à partir de leurs bassins versants. En effet, présents dans les engrais synthétiques et dans les déchets humains et animaux, ces nutriments se retrouvent dans les lacs et réservoirs à l’occasion du ruissellement agricole et du rejet des eaux usées.

« L’Écosse est réputée dans le monde entier pour la qualité de son eau. Des recherches comme celle-ci seront extrêmement précieuses pour éclairer l’élaboration de solutions et de mesures politiques visant à atténuer le changement climatique et à s’y adapter, ainsi qu’à protéger, restaurer et améliorer ces atouts naturels vitaux »[4], a déclaré Mairi McAllan, ministre de l’environnement.

Higlands, Ecosse – Flickr

« Nous avons déjà engagé 243 millions de livres sterling depuis 2015 dans le cadre du programme agroenvironnemental pour le climat afin de soutenir les pratiques de gestion de terres qui protègent et améliorent le patrimoine de l’Écosse, améliorent la qualité de l’eau, gèrent les risques d’inondation et atténuent et s’adaptent au changement climatique », a-t-elle ajouté.

Ainsi, des bandes tampons et des zones humides aménagées sont déjà en cours de développement dans de nombreux bassins versants écossais pour réduire les apports en nutriments. L’organisme public NatureScot, chargé de la protection, de l’étude et de la promotion du patrimoine naturel écossais, a quant à lui débloqué des fonds s’élevant à 65 millions de livres pour des projets de restauration de la nature qui soutiennent les efforts de conservation des lochs et réservoirs d’eau douce.

Pour prévenir une crise de l’eau et garantir la sauvegarde de ces écosystèmes vitaux, ce rapport illustre une nouvelle fois l’importance de répondre à l’appel de l’urgence climatique.

– W.D.

 

1] Center of Expertise For Waters, Assessing climate change impacts on the water quality of Scottish standing waters, 26 avril 2022, disponible sur: https://www.crew.ac.uk/publication/assessing-climate-change-impacts-water-quality-scottish-standing-waters

[1] Scottish Government, Climate change affecting Scotland’s lochs and reservoirs, 26 avril 2022, disponible sur: https://www.gov.scot/news/climate-change-affecting-scotlands-lochs-and-reservoirs/

[2] X., “Scotland’s lochs and reservoirs are warming rapidly, report says” in BBC News, 27 avril 2022, disponible sur: https://www.bbc.com/news/uk-scotland-61242322

[3] Amos, I., “Warning over health impacts as Scotland’s lochs and reservoirs heat up due to climate change” in The Scotsman, 26 avril 2022, disponible sur: https://www.scotsman.com/news/environment/warning-over-health-impacts-as-scotlands-lochs-and-reservoirs-heat-up-due-to-climate-change-3669067

[4] Ibid., https://www.gov.scot/news/climate-change-affecting-scotlands-lochs-and-reservoirs/

Photo de couverture « Loch » @Mary Hamilton/Flickr

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