Mers et océans sont à l’asphyxie. D’après un groupe d’experts dépêchés par l’UNESCO, les zones maritimes « désoxygénées » ont fortement progressé pendant les dernières décennies. Conséquence immédiate des activités humaines, le phénomène bouleverse les écosystèmes à l’échelle locale, puisqu’en l’absence d’oxygène, c’est la vie marine qui s’éteint, et pourrait avoir des conséquences globales, alors qu’une partie importante de l’oxygène de la planète vient des océans. Le point.

Les « zones mortes » se seraient multipliées de manière importante pendant les dernières années, non seulement en pleine mer, mais également dans les zones côtières. C’est le résultat de l’étude publiée par le Global Oxygen Network, un groupe de travail mis en place par l’UNESCO. Si le phénomène est déjà bien connu et a été documenté à plusieurs reprises de manière locale, cette nouvelle contribution apporte un nouvel éclairage quant à son ampleur à une échelle globale. De quoi rappeler aux décideurs l’urgence d’une action collective contre les pollutions liées à l’activité humaine.

Les pollutions et la hausse des températures en cause

Concrètement, ces « zones mortes » sont des espaces en manque ou totalement dépourvus d’oxygène. Sans oxygène, ces lieux se vident donc de toute vie, aussi bien au niveau de la faune que de la flore. Reste alors un grand cimetière où rien, ou presque, ne semble pouvoir subsister. Les causes de cette hécatombe sont multiples, mais les scientifiques pointent notamment du doigt l’utilisation massive d’intrants pétrochimiques par une agriculture toujours plus dépendantes aux dérivés chimiques et les autres produits qui ont pour origine les activités industrielles et qui terminent dans les cours d’eau et les océans.

Dans les milieux pollués des zones côtières, ces pollutions profitent à certaines algues qui prolifèrent de manière anormale, consommant d’importantes quantités d’oxygène, notamment pendant leur décomposition. Plus loin, en mer, le réchauffement de la température de l’eau diminue la capacité d’absorption d’oxygène des océans. Selon les scientifiques, si rien n’est fait, la situation continuera à s’aggraver dans les années à venir.

Dead FishesLe document établit que les zones « désoxygénées » en pleine mer ont quadruplé depuis 1950. Près des côtes, la surface des zones à faible teneur en oxygène a quant a elle été multipliée par 10 pendant la même période, pour atteindre un total impressionnant de 4,5 millions de km2. Dans ces zones mortes, la vie marine qui dépend de l’oxygène est donc rendue compliquée, voire impossible.

Rares sont les régions du monde habitées qui sont épargnées. On observe ainsi que le phénomène prend des proportions importantes le long des côtes européennes (Mer Baltique), en Asie, mais aussi dans le Pacifique ou sur la côte Est des États-Unis. Des activités humaines telles que la pêche, inévitablement affectées, pourraient à terme être amenées à disparaître de ces régions, touchant directement des millions de personnes qui dépendent de cette source de nourriture.

Les équilibres marins en danger

Les conséquences précises du phénomène, qui est observé depuis la moitié du 20ème siècle, ne sont pas encore toutes connues. Peu à peu, les scientifiques font état de l’ampleur de la situation alors même que celle-ci continue de se dégrader. Cependant, nous apprennent les chercheurs, il pourrait « affecter les cycles du carbone, de l’azote et d’autres éléments clés » dans l’environnement. Selon le CNRS, qui a relayé l’étude, le phénomène pourrait par ailleurs faire peser une menace immédiate sur les équilibres marins dans leur ensemble : « Le changement des teneurs en oxygène peut aussi déclencher le rejet de substances chimiques dangereuses telles que le protoxyde d’azote, un gaz à effet de serre jusqu’à 300 fois plus puissant que le dioxyde de carbone, et le sulfure d’hydrogène toxique », note entre autre le Centre national de la recherche scientifique. Comme pour le permafrost, c’est le risque de voir naître une nouvelle boucle rétro-active qui accélère le processus de départ.

Alors que les résultats obtenus par les chercheurs du Global Oxygen Network résonnent comme un (énième) appel à la communauté internationale d’agir au plus vite, les scientifiques du CNRS recommandent pour leur part, afin de lutter contre la menace, de « rédui[re] de façon drastique l’utilisation d’engrais agricoles et les émissions de gaz à effet de serre », de « protéger les espèces marines les plus vulnérables et les ressources océaniques » et d’ « améliorer la surveillance des teneurs en oxygène à travers le monde ».

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Notons que ce n’est pas le seul danger qui pèse sur nos océans, également menacés par la surpêche et la prolifération du plastique. Mais partout à travers le monde, de bonnes âmes luttent à leur échelle contre ces phénomènes. Peuvent-ils espérer un jour le soutien honnête et volontaire des décideurs ? Quelle responsabilité portent les filières industrielles à l’origine des plastiques non-biodégradables omniprésents dans notre quotidien ?

algues vertes à ST GUIMONT


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