Les habitants de la petite commune de Fairbourne située sur la côte ouest du Pays de Galles seront contraints dans les prochaines années à quitter leur maison en raison de la montée des eaux. Il s’agirait des premiers réfugiés climatiques de la région. Ici, difficile de nier l’ampleur – et surtout la rapidité extrême – de la crise climatique. Et pourtant…
C’est le premier village du Pays de Galle qui sera abandonné en raison du changement climatique. D’ici 2045, ou même avant selon l’évolution des risques climatiques, les 850 habitants de Fairbourne seront poussés au déménagement. Le déplacement se fera sous l’égide du Conseil de Gwynedd, organe directeur de la région.
Ce dernier, qui envisage cette possibilité depuis 2013, estimait en 2016 que lutter trop longtemps contre la hausse du niveau des mers via des moyens techniques revenait à mettre en danger la vie des habitants. Aucune compensation financière n’est prévue pour la perte de leur bien et, jusqu’à présent, la question de savoir où ces habitants seront logés à l’avenir n’a pas été réglée de manière claire. Pour nombre d’entre eux, c’est plusieurs années d’investissements et le travail d’une vie qui sont perdus.
À Fairbourne, les autorités espèrent que les défenses côtières permettront de résister à la montée des eaux pendant quelques années encore. Mais personne ne se fait de trop grandes illusions. Dès la moitié du siècle, le village commencera à être démantelé. D’autant que la montée des eaux apporte de nouvelles craintes : le phénomène accroît le danger que représentent les tempêtes ainsi que les fortes pluies qui peuvent provoquer d’importantes inondations.
Sur place, note « The Guardian », le prix de l’immobilier a baissé de 40 %. Certains investisseurs y voient toujours un intérêt afin de proposer des locations dans le secteur. Mais beaucoup de villageois peinent à vendre, donc à fuir sans trop de dégâts économiques. D’autres refusent d’envisager de quitter leur lieu de vie et vont jusqu’à nier l’inéluctable en remettant en cause la réalité du changement climatique, justifiant leur position. Une véritable expérimentation sociale à ciel ouvert pour le reste du monde. Même au bord du gouffre, il y a toujours une part de la population pour nier le danger. Certains espèrent que leur sort servira de mise de garde et « un appel au sursaut pour le pays ».
Les habitants de Fairbourne représenteront donc les premiers réfugiés climatiques du pays. Si dans certaines régions, des maisons proches de la côte ont été délaissées en raison de l’érosion, jamais une communauté entière avait été touchée jusqu’à présent. Au Royaume-Uni, le niveau de la mer s’est élevé de 15,4 centimètres depuis 1900, et le service national britannique de météorologie s’attend à une hausse supplémentaire de 1,12 mètre d’ici 2100. Le phénomène qui semble s’accélérer met en danger les populations qui vivent à proximité des côtes ainsi que dans certaines plaines peu élevées. L’est du Pays de Galles est particulièrement concerné, tout comme l’est et le sud de l’Angleterre. Quand bien même les émissions de gaz à effet de serre devraient diminuer dans les proportions prévues par l’accord de Paris (simple hypothèse, c’est l’exact inverse que l’on observe aujourd’hui), la hausse du niveau des mers continuerait de progresser pendant des centaines d’années.
L’évènement préfigure sans aucun doute une situation qui devrait se renouveler de manière de plus en plus régulière dans les prochaines décennies et ailleurs dans le monde. Les principales projections scientifiques envisagent d’ici la fin du siècle une montée du niveau des océans comprise entre un et deux mètres. Il s’agit d’une des conséquences directes de la hausse des températures moyennes du globe terrestre. À l’image du Pays de Galle, notre société n’est pourtant pas vraiment préparée à ces changements. Où reloger les personnes sinistrées ? Faut-il mettre en place une solidarité nationale pour les aider à acquérir un nouveau bien ? Quel statut pour les personnes qui n’ont d’autre choix que de quitter leur pays, car les conditions de vie sur place deviennent trop précaires, voire impossibles à cause de la crise climatique ? Des questions d’ordre politique qui restent largement tabou alors même qu’elles s’imposent de manière concrète dans la vie de millions de personnes.
Reste à savoir combien de temps encore gouvernements, multinationales et une grande part de la population vont-ils continuer à nier l’urgence ou même la simple réalité du changement climatique d’origine humaine…