Dans deux communiqués de presse distincts, Médecins Sans Frontières et P’tit déj à Flandre dénoncent le harcèlement de sans-abris étrangers par des policiers : à Paris, des forces de l’ordre interviendraient de manière régulière pour confisquer les couvertures de ces personnes se trouvant à la rue, faute de place dans les centres d’hébergement, cherchant à les faire dispersser. Une scène similaire avait été filmée aux États-Unis la semaine dernière envers des sans-abris.

Alors qu’une vague de froid s’abat sur la France, des associations se sont insurgées contre le comportement des forces de l’ordre qui s’apparente à du « harcèlement » et qui met « en danger la vie des migrants » sans domicile fixe. Les faits, rapportés par Corinne Torre, Coordinatrice de Programmes à Médecins Sans Frontières, mettent en cause les institutions publiques ainsi que les forces de police : « en plein cœur de l’hiver, les pouvoirs publics devraient être en mesure de fournir des places d’hébergement à tous les migrants, en urgence. Au lieu de quoi les forces de l’ordre confisquent leurs couvertures ou les obligent à rester debout dans la file d’attente du centre pendant des heures, dans une tentative dérisoire de soustraire cette population en détresse à la vue du public. »

Des interventions ciblées

Telles qu’elles sont décrites par Médecins Sans Frontières, les actions de la police sont menées dans  l’unique objectif d’obliger les réfugiés ainsi que les autres personnes se trouvant à la rue à se rendre dans des lieux moins fréquentés, loin des regards. Médecins sans Frontières précise que les policiers « utilis[ent] parfois des gaz lacrymogènes » pour disperser les migrants. En outre, il leur arrive de leur « interdi[r] de s’asseoir dans la file d’attente du centre humanitaire de la Chapelle où ils attendent une place d’hébergement. »

Des faits similaires ont été signalés par l’association P’tit déj’ à Flandre (un collectif composé de 170 habitants des 18ème et 19ème arrondissements de Paris), qui rapporte l’intervention auprès d’une soixantaine de personnes des forces de l’ordre et d’employés de la Mairie de Paris dans le 18ème arrondissement. Ces agissements de la part des représentants de l’État ne seraient pas des cas isolés. Aussi, Médecins Sans Frontières et P’tit déj en Flandre demandent à ce que ce « harcèlement » et ce « déni de la réalité » cessent immédiatement pour leur caractère profondément inhumain.

Camp de migrants dans Paris / Source : Libération

Les centres d’hébergements affichent complet

Ces interventions ciblées sont à l’opposé de toute solution constructive et respectueuse de la dignité humaine. Alors même que depuis quelques jours une vague de froid provoque des températures négatives, les places en centre d’hébergement sont trop peu nombreuses pour assurer une protection de tous, que ce soit sans-abris ou migrants. L’association P’tit déj’ à Flandre souligne d’ailleurs que dans le 18ème, « ce sont […] par centaines [que les migrants] se retrouvent chaque jour devant le centre, et les nombreux recalés se voient obligés de rejoindre des couchages de fortune installés tout autour, tolérés à l’unique condition qu’ils restent invisibles ».

Interrogé par RTL-Le Figaro-LCI, le ministre de l’intérieur Bruno Roux a affiché son soutien aux policiers et mis en cause les critiques émises à leur égard. À cette occasion, il a tenu à préciser que les policiers n’avaient « pas d’instruction autre que la mise à l’abri aujourd’hui de toutes les personnes qui sont vulnérables » ce qu’ils faisaient « avec une conscience du rôle qu’ils jouent, de l’uniforme qu’ils portent. » Cependant, il a voulu rappeler la volonté de L’État français d’empêcher « la reconstitution de campements ». Pourtant, rappelle Médecins Sans Frontières, les structures publiques existantes ne sont pas suffisantes pour protéger les migrants du froid et leur fournir un toit pendant la nuit : « le Centre Humanitaire de Paris, dispositif de l’Etat et de la ville de Paris ouvert le 10 novembre et destiné à accueillir et orienter les migrants récemment arrivés est saturé. Environ 100 à 150 personnes tentent quotidiennement d’y être admises et beaucoup doivent dormir dehors plusieurs jours avant qu’une place se libère. »

La polémique éclate deux semaines après qu’un cas similaire impliquant des sans-abris ait ému l’opinion publique outre Atlantique, obligeant la police locale à se justifier. Indépendamment de l’origine des individus, il semble que partout à travers le monde, les pauvres continuent d’être les boucs émissaires de toutes les frustrations et crises de nos institutions. Comment nos pays des droits de l’Homme qui ne cessent de donner des leçons au reste du monde peuvent-ils justifier pareils comportements des institutions publiques ?

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