La forêt recule au nom de logiques financières indifférentes aux conséquences environnementales et sociales. Que ce soit pour répondre à la demande mondiale en produits bois ou pour fournir de l’espace à l’industrie agro-alimentaire, le commerce du bois, florissant, excite l’appât du gain.
 Conséquence : le marché illégal du bois volé est devenu un véritable fléau.

Selon Interpol, l’exploitation forestière illégale représente actuellement entre 15 et 30 % des volumes de bois commercialisés dans le monde. Un bois coupé, transformé, transporté ou commercialisé en violation des lois nationales ou internationales. La valeur du commerce du bois récolté illégalement est estimée à environ 11 milliards de dollars. En comparaison, celle du marché de la drogue est estimée à environ 13 milliards de dollars. Plus c’est gros, plus ça passe ? Comment est-il possible de déplacer des millions de tonnes de bois sans tomber sous le coup de la loi ? Greenpeace a réalisé un « film » interactif qui révèle la triste réalité de ce trafic en Amazonie et en Afrique.

Nous consommons du bois illégal

En Amazonie, en 2013, après des années prometteuses à la baisse, la déforestation est repartie à la hausse à cause de l’exploitation illégale. Un tiers du bois est exporté vers l’Europe et la France en est le principal destinataire via ses grands ports (Caen, La Rochelle, Le Havre ou Nantes). Ces produits sont vendus sous forme de parquet, terrasse, caillebotis, etc. D’après les estimations de WWF, entre 20 et 40% du bois industriel consommé en Europe est d’origine illégale. Au Brésil, ce trafic est encouragé par l’absence de gouvernance des domaines publics, des terres indigènes et autres terres communautaires ainsi que par les capacités insuffisantes des autorités locales en matière d’inspection et d’application des lois. Même chose en République Démocratique du Congo où l’exploitation illégale fait perdre environ 10 milliards de dollars de recettes fiscales aux États de la région, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ce manque de transparence et de gouvernance dans le secteur forestier est scandaleux mais semble faire les affaires de quelques acteurs économiques.

La nature et l’humain en payent le prix

Les conséquences de ce trafic sont dramatiques. Que ce soit en Amazonie, dans le bassin du Congo ou en Asie du Sud-Est, les populations locales sont expulsées de leurs terres, souvent militairement, et voient leur cadre de vie détruit et pollué. Les industriels du bois et de l’agro-alimentaire prétendent créer emplois et richesses mais les conditions de travail dans les exploitations forestières sont déplorables. L’argent ne va ni aux salariés, ni aux collectivités locales, mais aux chefs d’entreprise et à quelques individus corrompus. De plus, la déforestation réduit les volumes de carbone que la forêt peut stocker et entraîne de graves émissions de gaz à effet de serre (lorsque la végétation défrichée se décompose ou est brûlée pour laisser place aux activités agricoles). Elle participe donc non seulement aux bouleversements climatiques mais, en plus, elle met en péril la biodiversité animale et végétale. En effet, la moitié des espèces terrestres de notre globe vivent dans ces forêts. En détruisant leur milieu naturel, l’industrie du bois (légale ou non) précipite leur disparition (à ce jour mille fois supérieure à son niveau naturel).

2014BVB - OS 03

Le règlement européen visant à bannir du marché communautaire le bois et les produits dérivés récoltés illégalement est entré en vigueur en mars 2013. L’objectif de la réglementation RBUE (Règlement sur le Bois de l’Union Européenne) est d’éradiquer les produits du bois d’origine illégale sur le marché européen. Pourtant la France, comme la plupart des pays membres, n’est toujours pas prête à appliquer le texte. Pour que des sanctions puissent être prononcées contre un importateur, le vote d’une loi, pour assurer au consommateur qu’il achète des produits légaux, est nécessaire. Elle doit également permettre un meilleur respect de la législation dans les pays forestiers et, ainsi, lutter contre la déforestation. Depuis plusieurs mois, Greenpeace demande au ministre de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, Stéphane Le Foll, d’améliorer cette loi. A qui profite l’attente ?


Lire l’article de Greenpeace France / rue89.nouvelobs.com / Image wikipédia

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