Les amateurs de thé ont sans doute déjà acheté du thé en sachet en gaze de papier ou en soie. Un conditionnement à usage unique relativement peu écologique. Mais les fabricants ont trouvé le moyen de faire pire. Depuis quelques temps, certaines marques conditionnent désormais leur thé dans des sachets en fibres de plastique. Des chercheurs ont analysé ce thé dont le sachet en plastique est soumis aux hautes températures d’une eau portée à ébullition.
Mettre du thé en sachet plastique jetable, il fallait oser ! À l’heure où les experts alertent sur la pollution de notre environnement – en particulier celle des océans – par cette même matière présente décidément partout. Alors même que certains lui cherchent des substituts, que des citoyens le boycottent, que des États interdisent les très polluants sacs plastiques pour privilégier les sacs en papier ou tissu. Merci aux industriels peu scrupuleux pour cette nouvelle invention. Ces sachets « nouvelle génération » se retrouve principalement chez des marques haut de gamme. Ils sont constitués de filets de nylon ou de PET (polyéthylène téréphtalate). On peine encore à concevoir l’intérêt si ce n’est économique pour la marque et peut-être une manière de se démarquer de la concurrence.
Ce sont des chercheurs de l’Environmental Science & Technology d’ACS qui ont fait cette découverte qui hélas ne surprend guère : le thé conditionné en sachet plastique ne fait pas qu’infuser les feuilles des plantes, mais libère également des particules de plastiques à l’échelle micrométrique et nanométrique. Le tout, en quantité phénoménale. De plastique qui se retrouvera inévitablement dans l’eau du thé puis dans l’organisme du consommateur.
Pour conduire son étude, l‘équipe s’est procurée quatre thés commerciaux différents conditionnés dans des sachets à thé en fibres synthétiques. Les sachets ont été ouverts, les feuilles de thé retirées pour laver les sachets vidés. Les contenants synthétiques ont été placé au contact d’une eau portée à ébullition comme lors d’une infusion (5 minutes à 95 degrés). L’eau est enfin analysée par microscopie électronique. Les chercheurs ont ainsi découvert qu’un seul sachet de thé en plastique libérait environ 11,6 milliards de particules de microplastiques et 3,1 milliards de nanoplastiques dans l’eau. Il s’agit de niveaux qui sont des milliers de fois plus élevés que ceux rapportés précédemment dans d’autres aliments. Donc en consommant ce thé, l’amateur de cette boisson consomme aussi, sans s’en douter, des quantités importantes de plastique.
Les scientifiques ne peuvent pas se prononcer pour l’instant sur les effets à long terme de cette ingestion de plastique sur l’organisme, des recherches supplémentaires seront nécessaires. Certes, on pourrait espérer qu’à très faible dose, cela ne représente pas un danger pour la santé. Mais il faut toutefois se souvenir qu’en juin dernier des chercheurs de l’université de Newcastle ont rendu un rapport (commandé par la WWF) révélant qu’un consommateur moyen ingère l’équivalent d’une carte bancaire de plastique chaque semaine !
Une carte de banque, c’est environ 5 grammes ou – environ – 2 000 micro-particules. On arrive à une consommation moyenne de 21 grammes de plastique par mois, soit, en un an, un peu plus 250 grammes. L’eau consommée en bouteille plastique se trouve être la principale source de ce micro-plastique ingéré, puis viennent les fruits de mer, la bière et, plus surprenant, le sel. Il faudra désormais ajouter le thé à la liste, sous ce type de conditionnement. À de telles doses, difficile d’imaginer que les conséquences de l’ingestion d’un produit à base de pétrole puissent être totalement nulles. Un phénomène relativement récent dont on peine à comprendre les effets systémiques sur l’organisme à ce jour.
En plus d’un impact sur l’environnement qui n’est plus à démontrer, la lutte contre la pollution plastique sera peut-être demain aussi un combat pour notre santé. Par précaution, pour notre santé et la planète, et si on buvait simplement du thé en vrac ?
S. Barret