Comment les régimes alimentaires à base de plantes réduisent non seulement notre empreinte écologique, mais augmentent également la capture du carbone à l’échelle de la planète ? Voici la question cruciale à laquelle répond une nouvelle étude publiée dans la célèbre revue Nature Food le 10 janvier dernier. Les chercheurs de l’Université de Leiden, au Pays-Bas, parviennent ainsi à démontrer comment 100 milliards de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) pourraient être extraites de l’atmosphère d’ici la fin du siècle, à condition d’adopter un « régime de santé planétaire » particulier ! Explications.

Si chaque pays à revenu élevé passait à un régime alimentaire à base végétale, nous sauverions l’équivalent de 14 ans d’émissions du secteur agricole, assurent les scientifiques.

Pour arriver à ce résultat, les calculs sont plus simples qu’ils n’y paraissent. Alors que le pâturage et la production d’aliments des animaux occupe environ 80 % des terres agricoles, soit environ 35 % des terres habitables dans le monde, la surface nécessaire à la production d’une alimentation végétale serait substantiellement inférieure.

Ainsi libérées, de vastes zones pourraient alors revenir à leur état naturel, emplies de plantes et d’arbres sauvages capables de capter une part importante du carbone présent dans l’atmosphère. « C’est peut-être l’une des plus grandes opportunités en matière de santé environnementale », assure Zhongxiao Sun de l’Université agricole de Chine, correspondant international de l’étude néerlandaise.

Les forêts constituent des puits de carbone inestimables. – Pixabay

Quel régime alimentaire adopter pour sauver la planète ?

Afin de préciser ce phénomène, l’équipe scientifique s’est basée sur une précédente recherche menée par la Commission EAT-Lancet sur l’alimentation, la planète et la santé, qui a réuni 37 scientifiques de renommée mondiale pour répondre à une question unique : « pouvons-nous nourrir une future population de 10 milliards de personnes avec une alimentation saine dans les limites de la planète ? ».

Le rapport qui en a suivi est le premier examen scientifique complet de ce qui constitue une alimentation saine issue d’un système alimentaire durable.

« La consommation mondiale de fruits, légumes, noix et légumineuses devra doubler et la consommation d’aliments tels que la viande rouge et le sucre devra être réduite de plus de 50% » indique le Professeur Walter Willett de l’Université d’Harvard.

Le document détaille également les actions qui peuvent soutenir et accélérer la transformation du système alimentaire, comme la réduction des pertes et des déchets alimentaires, la gouvernance stricte et coordonnée des terres et des océans, et la réorientation des priorités agricoles vers un système qualitatif plutôt que quantitatif.

Les plats ci-dessus sont des exemples de régimes alimentaires de santé planétaires. – Crédits : Commission EAT-Lancet

Seulement 17 % de la population concernée

Sur base de ce « régime de santé planétaire », les chercheurs de l’Université néerlandaise ont concentré leur analyse sur cinquante-quatre des pays à revenus les plus élevés de la planète, représentant ensemble 68% du produit intérieur brut mondial mais seulement 17% de la population.

« Nous avons examiné les régions à revenu élevé car elles disposent de nombreuses options à base de plantes pour les protéines et d’autres besoins nutritionnels. Dans les régions à faible revenu, les gens consomment moins de protéines animales mais en dépendent souvent pour leur santé », explique ainsi Paul Behrens de l’Université de Leiden, auteur principal de la recherche.

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Si cette population ciblée changeait drastiquement ses habitudes alimentaires, le résultat serait sans appel : cette transition alimentaire conduirait à la diminution des émissions annuelles de la production agricole de 61 %.

De plus, le réensauvagement d’anciennes terres cultivées et de pâturages éliminerait 98,3 milliards de tonnes de dioxyde de carbone supplémentaires de l’atmosphère d’ici la fin du siècle. D’après les scientifiques, il est indéniable que ce profit carbone aiderait considérablement à empêcher la planète de se réchauffer de plus de 1,5 degré. « C’est une opportunité remarquable pour l’atténuation du changement climatique », souligne en effet les auteurs du rapport.

La réduction des pertes et des déchets alimentaires s’inscrit dans la stratégie de la Commission EAT-Lancet. – Pixabay

Des milliards de tonnes de carbone supplémentaires captées dans l’atmosphère

« Mais cela aurait également des avantages considérables pour la qualité de l’eau, la biodiversité, la pollution de l’air et l’accès à la nature, pour n’en nommer que quelques-uns », rappellent-t-ils.

Ces changements diététiques sont également susceptibles d’avoir des effets bénéfiques majeurs sur la santé d’après la Commission EAT-Lancet, notamment en réduisant le risque de maladies non transmissibles telles que les maladies cardiovasculaires, le cancer colorectal et le diabète de type 2.

Les scientifiques estiment ainsi prévenir environ 11 millions de décès prématurés par an, soit entre 19% et 24% du nombre total de décès chez les adultes.

Ces mesures diététiques contribueraient à prévenir plus de 11 millions de morts prématurées chaque année. – Crédits : Commission EAT-Lancet

Pour voir leurs espérances réalisées, les chercheurs appellent à une gestion politique cohérente et progressive de la transition alimentaire et agricole : « nous n’avons pas besoin d’être puristes à ce sujet, même le simple fait de réduire la consommation d’animaux serait utile à l’environnement et la santé publique ».

Ils encouragent également les politiques à rediriger les subventions publiques vers les agriculteurs qui œuvrent pour la protection de la biodiversité et la séquestration du carbone, convaincus que lier les politiques foncières, alimentaires, climatiques, sociales et de santé publique sera essentiel pour exploiter les opportunités d’un double dividende climatique

Pour celles et ceux qui y verraient malgré tout quelques contre-arguments, voici de quoi aller plus loin : https://mrmondialisation.org/vegan-7-contre-attaques-pour-survivre-aux-fetes/ 

L.A.

Photo de couverture @Zen Chung/Pexels

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