Les poissons morts continuent de s’échouer sur les rives de la baie de Rio où doivent se tenir dans moins de 500 jours les épreuves d’aviron et de canoë/kayak durant les Jeux Olympiques de 2016. Ces hécatombes de poissons sont désormais fréquentes dans les cours d’eau de Rio, où se déversent eaux usées et ordures d’une ville grouillante de vie.
Des milliers de poissons morts aux côtés de déchets en tout genre flottent depuis plusieurs semaines dans la lagune Rodrigo de Freitas à Rio. La ville devrait pourtant accueillir les épreuves d’aviron et de canoë/kayak lors des Jeux Olympiques de 2016. Faut-il camoufler les conséquences des activités humaines où attaquer le problème à la source ? La même question avait été posée avant la coupe du Monde de football en 2014, évènement qui fut lui même extrêmement producteur de déchets dans la région.
Image : Sergio Moraes / Reuters
Cachez cette pollution que je ne saurais voir
Des mesures d’urgence ont été prises pour améliorer la qualité de l’eau de la lagune avant qu’il ne soit trop tard. En effet, ces conditions pourraient bien obstruer le bon déroulement des Jeux Olympiques. Mais cette mission devrait prendre du temps et, selon le gouverneur de l’État, Luiz Fernando Pezao, les objectifs ne seront pas atteints avant les Jeux : « La dépollution sera terminée d’ici fin 2018. Actuellement, 49% de la baie a pu être nettoyée. On devrait arriver à 60% d’ici les Jeux » estime-t-il. La compagnie municipale de nettoyage a déjà fait retirer 37,4 tonnes de poissons morts.
Le secrétaire chargé de l’environnement à Rio a décrété que ce phénomène était le résultat d’un brusque changement de température de l’eau couplé à une faible circulation de l’eau. Mais des scientifiques rejettent cette explication. Pour Paul Rosman, un océanographe positionné sur la baie de Rio, les poissons meurent à cause d’une trop forte concentration du dioxyde de carbone dans l’eau qui provoque donc un manque d’oxygène et l’asphyxie. Celui-ci a également ajouté que le gouvernement brésilien avait ignoré les propositions scientifiques pour améliorer la qualité de l’eau. Cette solution, plus couteuse, consistait à installer des canaux de dragage ayant pour but d’extraire les résidus situés sur le fond de la lagune.
L’état de l’eau dans la lagune serait à ce point préoccupante qu’elle occasionne une gêne pour certains athlètes qui viennent s’entraîner sur la baie. Felipe Xavier, un athlète brésilien qui vient ramer plusieurs kilomètres par jour témoigne: « Je suis obligé de venir m’entraîner. Cette mortalité de poissons nous dérange car l’odeur est très forte et la quantité de poissons morts freine le bateau. » Un autre rameur brésilien confirme « On se sent vite mal, on a des nausées. Donc on arrête de ramer et on va se reposer. » On imagine mal des jeux officiels dans ces conditions.
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Pas vraiment une exception
Loin du regard des caméras, la baie de Rodrigo de Freitas n’est pas la seule à subir la pollution. En effet, des bactéries ont été trouvées à plusieurs endroits du fleuve Carioca, l’un des principaux lieux se trouvant à l’endroit même où se dérouleront les épreuves de voile des Jeux Olympiques de 2016. Ces bactéries produisent de l’enzyme KPC, résistante aux antibiotiques. Pour l’instant, aucun baigneur infecté n’a été recensé, mais un contact avec ces bactéries provoqueraient des infections nécessitant une hospitalisation. La microbiologiste Ana Paula d’Alincourt précise que : « il existe le risque d’attraper des maladies qui ne sont pas plus graves que d’autres, mais le problème c’est qu’en cas d’infection, il est possible que le traitement exige une hospitalisation. »
Lors du premier test olympique de voile en août dernier à Rio, le champion olympique australien Nathan Outteridge avait heurté un chien mort avec son bateau. D’autres navigateurs avaient raconté avoir dû éviter des chats morts, des rats, des tables, des chaises ou même des valises, le tout flottant à la surface ! On comprend maintenant pourquoi certains brésiliens comparent la baie de Rio à d’immenses latrines. Une image tristement « réaliste » qui ne plait guère aux autorités et encore moins aux organisateurs d’évènements.
Image : Sergio Moraes / Reuters
Malgré des paysages de cartes postales, Rio doit faire face à une pollution croissante liée à une activité humaine très peu soucieuse de l’environnement. Si des mesures d’urgence ont été mises en place pour nettoyer la baie en vue des Jeux Olympiques de 2016, celle-ci ne pourra néanmoins pas être entièrement dépolluée d’ici le commencement des épreuves. On ne doute cependant pas que les animaux morts et les déchets seront au minimum écartés des caméras pour éviter tout préjudice moral aux multinationales sponsors…
Sources : geopolis.francetvinfo.fr / afp.com / liberation.fr / uk.businessinsider.com
