Plusieurs associations environnementales avaient porté plainte contre la FIFA pour avoir orchestré un greenwashing lors de la coupe du monde de football au Qatar en 2022. La Commission Suisse pour la Loyauté (CSL) vient de leur donner raison.


Même si chacun savait parfaitement que cette coupe du monde était un désastre écologique, la FIFA avait tout de même eu le culot d’essayer de faire croire au grand public que la compétition avait été « neutre en carbone ». Grâce à 5 ONG, la Commission suisse pour la loyauté (CSL) a estimé que vanter la neutralité carbone du Mondial 2022 de football sans pouvoir la démontrer est « déloyal ».

Catastrophe écologique et humaine

Non content d’être un désastre social qui avait coûté la vie à pas moins de 6 500 ouvriers, le tournoi s’est révélé être aussi une terrible plaie pour la planète. La construction de stades, de routes et d’infrastructures dans une région inadaptée à l’organisation d’un mondial de football paraissait d’ailleurs déjà absurde. De nombreuses personnes avaient appelé au boycott.

Caricature sur les chantiers de construction au Qatar avant la Coupe du monde 2022. Wikicommons

Les fortes températures dans le pays avaient en outre contraint la FIFA à programmer la compétition en plein hiver, une première dans l’Histoire de ce sport. Mais il avait en plus fallu climatiser des stades à ciel ouvert. Comble du ridicule, cette mesure ne s’était pas avérée utile avec une chaleur moins importante que prévue. Ce qui n’a pas empêché les organisateurs de faire tourner le système, plongeant dans le froid les supporters présents à certains matchs.

Une machine à cash

Et malgré l’évident problème environnemental posé par ces circonstances, la fédération internationale de football, bien appuyée par le Qatar, n’a rien trouvé de mieux à inventer qu’une prétendue neutralité carbone pour cette compétition.

Il faut dire que le plus prestigieux tournoi du monde est une véritable machine à argent. À tel point qu’il a un temps été envisagé de l’organiser tous les deux ans au lieu de tous les quatre ans comme actuellement. La FIFA aurait ainsi engrangé pas moins de 7,2 milliards de profit lors de la dernière édition.

Une vitrine pour les pétromonarchies

Du côté du Qatar, l’investissement mettra sans doute beaucoup plus de temps à être rentable. Le pays d’à peine 2,4 millions d’habitants a en effet énormément misé sur cette coupe du monde et sur le football en général pour enjoliver son image à travers le globe.

Travailleur bangladais au Qatar pour le mondial 2022 © OIT. Source : Flickr

Le Qatar cherche ainsi à faire oublier qu’il bafoue les droits humains et que son économie toute entière est fondée sur l’exploitation d’énergies fossiles qui sont en train de ravager la planète (ce qui en fait la nation la plus pollueuse sur terre). Il préfère évidemment plutôt qu’on se souvienne qu’il a permis au PSG de devenir un club de première importance ou qu’il a vu Lionel Messi enfin soulever le trophée ultime.

« Une communication déloyale »

En fin de compte, le processus de greenwashing engagé par la FIFA et le Qatar n’est pas différent. Il s’agit là de redorer son blason auprès du grand public sur un sujet de plus en plus prégnant dans l’actualité. C’est bien pour cela que la Fifa a tenté de ralentir l’instruction de la plainte sur sa « neutralité carbone » portée par Notre affaire à tous (France), l’Alliance climatique (Suisse), Carbon Market Watch (Belgique), le New Weather Institute (Grande-Bretagne) et Fossil Free Football et Reclame Fossietvrij (Pays-Bas). Cela n’a pas empêché que la CSL de qualifier les propos de l’organisation mondiale du football de « communication déloyale » et de « recommander » à la Fifa d’abandonner à l’avenir ce type d’affirmation.

Stade Al Wakrah construit en plein désert à Doha au Qatar. Flickr

Si la CSL n’inflige pas de sanction et n’impose pas de rectificatif à l’instance mondiale du football, sa décision pourrait, en revanche, représenter une très bonne nouvelle pour l’avenir.  En effet, en créant un précédent historique sur la nécessité des instances à prouver concrètement ce qu’elles affirment (ici la neutralité carbone de la compétition), elle pourrait ainsi empêcher que le sport soit à nouveau instrumentalisé à l’avenir sur la question climatique.

– Simon Verdière

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Photo de couverture : Gianni Infantino, président de la FIFA. Wikicommons

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