Wulo : une alternative éthique à Uber, 100% française

Contre Uber et ses dérives, une alternative associative et sans commission a vu le jour début 2018. Le but : regrouper enfin les taxis et les Voitures de Transport avec Chauffeur (VTC) sur une seule et même plateforme, et que l’argent des consommateurs aillent directement aux chauffeurs plutôt qu’à une quelconque multinationale. L’équipe de We Demain est allée rendre visite à Manfred Touron, créateur de l’application Wulo avec l’association de protection des chauffeurs United Drivers.


Wulo, une petite application au grand potentiel

Wulo, c’est donc le nouveau projet de l’association United Drivers qui vise à revaloriser le métier de chauffeur. Alternative éthique à Uber et 100% française, Wulo veut tout simplement remettre en place les échanges les plus simples : “C’est une plateforme de mise en relation entre particuliers et chauffeurs, taxi ou VTC, associative, sans but lucratif » explique ainsi Manfred Touron, en insistant bien sur l’aspect non lucratif de l’application. Garantir ainsi aux consommateurs que l’argent de la course va directement aux chauffeurs, sans commission, jusqu’à ce que les chauffeurs puissent eux-même fixer leurs tarifs : voilà l’objectif de Wulo.

“L’intérêt des chauffeurs passe en premier”

“L’intérêt des chauffeurs passe en premier” […] « Deux courses chez Wulo, c’est l’équivalent de trois courses chez Uber au niveau financier ». Pour le moment, l’application affiche des prix alignés sur les tarifs des concurrents, mais avec une commission de 0 %. Ceci implique donc une importante augmentation de revenu pour les chauffeurs ! Seuls quelques frais bancaires sont à la charge des chauffeurs, leur permettant ainsi de gagner plus que sur les plateformes de multinationales de type Uber.

Mais aussi, Wulo veut rapprocher Chauffeurs privés et Taxis, qui se font la guerre depuis l’ubérisation des routes. Ainsi, les taxis peuvent désormais s’inscrire et bénéficier de l’avantage d’avoir (enfin) une application égale qui leur permettent d’apparaître sur le même marché.

Pour les utilisateurs, l’application, disponible sur Android et iOS, reprend le concept de notation des chauffeurs, en offrant de plus la possibilité pour les clients de ne sélectionner que des chauffeurs avec une note à partir de 4,5/5 par exemple. En option, on peut également demander certains critères tels que le siège bébé, le voyage avec animaux, le mode de paiement…

Le défi de United Drivers : revaloriser le métier de chauffeur

Pérenniser le métier de chauffeur, voila l’objectif à long terme de l’association d’étudiants de l’école 42 à l’origine de l’application Wulo. Comment ? En augmentant leur salaire, ou en leur offrant de faire moins d’heures pour un revenu équivalant. Mais aussi, en amenant au gouvernement des propositions basées sur les discussions avec les chauffeurs lors des événements et sur leurs statistiques. Et à terme, leur assurer des droits sociaux, notamment une retraite juste.

« Lorsque quelqu’un entre dans un Uber j’aimerais bien désormais qu’il sache que les 25 % qu’il verse vont à une boite qui ne paye même pas ses impôts en France, et non au chauffeur qui travaille et en a vraiment besoin. »

Uber : une société à scandale ?

Accusations de sexisme, discrimination, harcèlement… Uber n’en est plus à son premier scandale. Si bien que le hashtag #DeleteUber a connu un franc succès sur Twitter en février de l’année dernière, avec le retour de l’affaire Susan Fowler. Pour l’histoire, cette ingénieure avait témoigné publiquement sur la façon dont l’entreprise avait fermé les yeux sur le harcèlement sexuel qu’elle subissait de la part d’un supérieur, ce dernier protégé par les “leaders” grâce à sa “performance élevée”. Pire encore, elle aurait été elle-même menacée d’une mauvaise évaluation si elle ne prenait pas la décision de changer de service. Dans son témoignage, Susan affirme que son cas était loin d’être isolé, qu’on a essayé à maintes reprises de la décourager de signaler d’autres attitudes sexistes et des abus, et qu’on a bloqué sa promotion.

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« il nous reste 3,75 euros de l’heure »

Enfin, Uber a fait face à un mouvement de protestation plus global. En France, le mouvement “VTC en Colère” en janvier dernier était un acte de boycott de la part des chauffeurs, qui dénoncent leur paupérisation face à l’augmentation des commissions de la part de l’entreprise de manière totalement injustifiée (si ne n’est le besoin de profits). En effet, Uber a imposé aux conducteurs à l’automne 2015 une baisse soudaine de 20 % de leurs tarifs. Et fin 2016, la société a augmenté sa commission prélevée de 20 à 25 %.

Or après la location de la voiture, la commission, la TVA, l’essence et les bouteilles d’eau, beaucoup d’entre eux se retrouvent avec moins d’un smic pour vivre. Cette pratique ne s’observe évidemment pas que chez Uber, d’autres multinationales utilisant des systèmes utilisant de « faux indépendants » pour maximiser leurs profits. Ainsi, nous observons une « ubérisation de la société » synonyme d’esclavage moderne. “Une fois les frais déduits (entretien et location de la voiture, assurance… ndlr), il nous reste 3,75 euros de l’heure », à affirmé ainsi Jean-Luc Albert de l’association Actif-VTC.

Lorsque ces chauffeurs en colère on été interrogé en 2016 lors du mouvement “VTC en colère”, la plupart vivaient une véritable descente aux enfers de leur métier, à cause notamment d’une « dictature des applications » qui auraient aggravé leurs conditions de travail. Des alternatives libres et gratuites sont donc vitales pour offrir une porte de sortie aux chauffeurs. Même chose en matière de livraison où de nouvelles plateformes locales voient le jour, comme à Nantes, pour lutter contre le monopole de Deliveroo.

Wulo, une alternative plus éthique ?

« On veut faire passer le message que l’on est une association et que l’on ne veut pas décider à leur place ou les escroquer » – Manfred Touron. United Drivers et Manfred Touron ont pour but d’offrir enfin aux Chauffeurs-Privés la voix qu’ils n’arrivent pas à avoir face aux entreprises carnassières telles que Uber. Mais qu’il s’agisse de Uber, ou de tout autre société-ogre, il est bien souvent difficile de se faire entendre lorsque nous n’appartenons pas à la « bonne » classe socio-professionnelle. La solution dès lors, comme l’a trouvé Manfred Touron, c’est, avec ses moyens et sa créativité, tenter de remettre en avant les éléments les plus simples des échanges humains, sans course aux profits, sans commission, sans compétition acharnée. “L’esprit de concurrence s’est imposé dans la Culture jusqu’à notre époque, de façon à ce qu’au final, on soit toujours le perdant de quelqu’un d’autre.” nous explique par ailleurs Axel Lattuada dans cette récente vidéo.

« J’espère apporter un peu d’espoir, pour que chauffeur reste une profession d’avenir »

Ainsi, Wulo s’inscrit désormais dans un mouvement plus large de remise en cause de l’économie collaborative. De ce fait, plusieurs applications ont déjà vu le jour pour contrecarrer les géants, comme GuesttoGuest pour AirBnb par exemple. Enfin, remettre en avant la nécessité de discussion entre les utilisateurs et les chauffeurs, ou tout simplement être à l’écoute des besoins des premiers concernés de façon bienveillante, voila peut-être la recette “miracle” pour une société plus juste.


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