Le dernier épisode en date de #datagueule vient de paraître et il risque de ne pas plaire à tout le monde ! Comme à leur habitude, c’est avec précision, chiffres et détails que l’équipe aborde un sujet particulièrement épineux : aujourd’hui, l’évasion fiscale.

Nous en avons une claire idée depuis les affaires Luxleaks et, plus récemment, Panama Papers, l’évasion fiscale représente un fléau pour les Etats qui peinent plus que jamais à boucler leur budget en dessous de la barre des « 3% de déficits » imposée par la Commission Européenne. En effet, certaines entreprises ou détenteurs d’importants capitaux ont recours à ce procédé pour échapper aux impôts nationaux, donc à l’effort collectif (école, santé, sécurité…) en plaçant les bénéfices de leurs activités dans des comptes bancaires situés dans des pays ayant une fiscalité plus avantageuse.

Et les chiffres sont vertigineux, comme l’indiquait déjà l’équipe de #datagueule dans une vidéo précédente : au niveau mondial, l’évasion fiscale aurait pour conséquence des pertes fiscales estimée à 130 milliards d’euros, auxquelles s’ajoutent 160 milliards d’euros qui échappent aux mains des États par le biais de la technique dite d’optimisation fiscale. Une manne financière injustement volatilisée qui pourrait pourtant régler bien des crises internes qui contraignent en ce moment des millions d’individus à subir l’austérité.

Dans la nébuleuse de l’évasion fiscale

Concrètement, les entreprises à l’origine de l’évasion fiscale profitent de l’intérêt qu’ont certains pays à accueillir au sein de leurs banques, les énormes bénéfices engendrés dans des pays tiers – et donc de s’opposer à l’édiction de tout cadre légal contraignant. Par ailleurs, elles jouissent de la possibilité de créer des filiales, sociétés écrans, pour pouvoir s’installer en toute discrétion dans d’autres paradis fiscaux. Ainsi, des bénéfices réalisés en France par une filiale peuvent être déclarés en Suisse via une autre filiale installée ailleurs et échappent de cette manière à une taxation normale. Rien que pour les entreprises du CAC40, il existerait plus de 1500 filiales de ce genre ! Comme il n’existe à ce jour pas d’obligation de transparence, ni règles du jeu au niveau international, et que les filiales sont juridiquement indépendantes les unes des autres, contrôler et pénaliser ces activités frauduleuses s’avère complexe.

riches_evasion_fiscaleDessin : Soulcié

L’évasion fiscale dans le viseur des élus ?

Après la publication des « Panama papers » et le scandale international qui s’en est suivi, il était difficile pour le gouvernement de ne pas réagir. Le 6 juin dernier, s’ouvrait à l’Assemblée nationale française, en procédure accélérée, un débat parlementaire portant sur le Projet de loi Sapin 2 sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique. Au niveau européen on prend également le problème à bras le corps et on essaye d’afficher un certain volontarisme politique : jeudi 8 juin le Parlement européen approuvait une directive contre l’évasion fiscale.

Pourtant, de nombreuses nombreuses associations et ONG déplorent déjà l’insuffisance du texte français. Le journal l’Humanité rapporte notamment que les mesures contenues dans la loi « ne [permettant] en aucun cas de lutter contre l’évasion fiscale des multinationales qui prive chaque année la France, mais aussi les pays les plus pauvres, de centaines de milliards d’euros ». Les même critiques ont été formulées à l’égard des propositions de l’Union européenne. Certains se demandent donc si ces mesures ne sont pas de la poudre aux yeux pour calmer l’opinion sur ces questions fondamentales.

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Que manque-t-il donc à la loi pour pouvoir espérer mettre un terme à ces pratiques illégales ? Un reporting pays par pays public, c’est à dire une « [obligation] pour les entreprises [de] rendre publiques des informations comptables précises concernant leurs activités (notamment le chiffre d’affaires, le profit, le nombre d’employés et les impôts payés) dans chaque territoire où elles sont implantées, de manière à mesurer si les impôts versés correspondent à la réalité de l’activité économique de l’entreprise ». C’est ce que souligne également #datagueule, pour qui jusqu’à présent « l’opacité […] est la règle, la transparence l’exception ». Et si le Projet de loi Sapin 2 met en place une obligation de reporting ce n’est que sous la forme d’un « simulacre », estiment quant à eux les responsables de plusieurs associations luttant contre la corruption et l’évasion fiscale. En effet, le texte ne prévoit à ce jour, dans la majorité des cas, qu’une obligation de transparence pour un nombre limité de filiales par pays.

Or, les pays de l’OCDE ont-ils seulement intérêt à mettre en place une lutte efficace contre l’évasion fiscale ? C’est ce que l’équipe de #datagueule met en doute au regard de l’inefficacité des lois mises en place jusqu’à ce jour, aussi bien au niveau national qu’au niveau de l’Union européenne. D’autant que jusqu’à présent, les pays du Nord se sont bien gardés d’accéder aux requêtes des pays en voie de développement, qui sont les premiers à souffrir de l’impunité des multinationales. De manière très simple, tout semble implicitement fait pour « libéraliser » les affaires des grands détenteurs de capitaux, chaque pays craignant les voir fuir vers d’autres plages ensoleillées…

La vidéo


Sources : humanite.fr / lemonde.fr / blogs.mediapart.fr/ novethic.fr

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