Le cannabis est régulièrement au cœur de l’actualité. Avec le tout récent « Appel du 18 joints », c’est au tour du National Geographic, la très renommée revue internationale de découverte, de mener son enquête sur cette plante controversée. Petit tour d’horizon des conclusions du « Nat Geo » sur une plante stigmatisée dont on a pas fini de parler…

À travers un dossier d’une trentaine de pages, le National Geographic prend le risque de (re)découvrir les vertus rarement médiatisées du Cannabis, dont ses fameuses promesses thérapeutiques méconnues. Stigmatisée par les uns, adulée les autres, son envol économique dans le monde ne fait aucun doute et de plus en plus de pays tolèrent sa consommation thérapeutique ou non. Autour d’elle, quantité de recherches sont menées et restent à mener dans le domaine de la chimie et de la génétique avec des applications espérées en cancérologie. Le prestigieux magazine se penche ici sur une série d’acteurs de terrain qui gravitent autour de l’utilisation du Cannabis, nous livrant un récit modéré et raisonnable.

Avant toute chose, il est peut-être judicieux de préciser que le cannabis est le terme latin de la plante, et qu’en français elle se nomme chanvre, peu importe son taux de THC (fameuse molécule controversée pour ses effets chez l’Homme). Il est en effet nécessaire d’éviter l’amalgame entre la plante et les effets de ses molécules. Un amalgame sur lequel vont se bâtir une stigmatisation d’une ampleur jamais vue dans l’histoire. En réalité, les êtres humains consomment du cannabis à des fins médicinales depuis des millénaires autant que pour la confection de textiles. Cependant, cela fait seulement quelques années que la médecine possède l’autorisation de l’étudier dans certains pays pour que ses molécules soient mises sur le marché.

Ces enfants dont l’huile de cannabis change la vie

Les équipes du National Geographic se penchent sur le cas de Lily Rowland, 9 ans et Addelyn Patrick, 2 ans et demie. Deux enfants atteints d’épilepsie sévère. Sans aucun traitement, ces enfants subissent jusqu’à 300 crises par jour caractérisées par de violentes convulsions. La médecine moderne préconise l’administration de puissants médicaments dont l’effet secondaire est un état partiellement végétatif. Après quelques recherches, les parents de la petite Addy décident de s’installer au Colorado afin de pouvoir bénéficier du cannabis thérapeutique légalement.

L’ingestion de cannabidiol (CBD) sous forme d’huile, une molécule au potentiel thérapeutique observé, permet de réduire les crises d’épilepsie à quelques-unes par jour, sans aucun effet secondaire. Pratiquement libérés de leurs convulsions, ces jeunes enfants vont reprendre la capacité de profiter du monde qui les entoure. Si les recherches en sont à leurs balbutiements sur le sujet, les cas concrets d’utilisation thérapeutiques du cannabis sont porteurs d’espoir.

cannabis_childCrédit : National Geographic n°189, juin 2015

Cannabis et cancer, miracle en approche ?

Il ne fait plus aucun doute que le cannabis permet d’assister de nombreux patients cancéreux dans leur dur combat. Diminution des nausées, augmentation de l’appétit et du sommeil et apaisement général, le cannabis joue un rôle certain dans la lutte contre la maladie. Mais des blogs peu crédibles vont jusqu’à affirmer que le cannabis soignerait le cancer. Le docteur Manuel Güzman, brillant biochimiste étudiant le cannabis depuis une vingtaine d’année, met en garde contre ces croyances. S’il estime que le cannabis n’est pas en mesure de vaincre le cancer à lui seul, Güzman explique que les tests menés sur des rats de laboratoire montrent qu’une tumeur au cerveau peut être réduite et même disparaitre totalement dans un tiers des cas, grâce aux molécules du cannabis. Il insiste sur le fait que les êtres humains ne sont pas des rats et qu’il reste énormément de travail pour tirer des conclusions claires dans le domaine. En outre, d’autres tests sur des animaux de laboratoires tendent à prouver qu’une consommation abusive pendant la grossesse engendrerait certains traumatismes physiques et psychiques sur l’enfant.

La bonne nouvelle, c’est qu’un test clinique est actuellement en cours en Angleterre chez l’humain. Des patients atteints d’une tumeur cérébrale sont actuellement soignés à l’aide d’un mélange de THC, de CBD et de témozolomide, qui est l’association thérapeutique optimale selon Manuel Güzman. « Les mentalités changent dans le monde entier » exprime le docteur. « Les organismes de financement savent désormais que le cannabis, en tant que médicament, est scientifiquement sérieux, médicalement prometteur et cliniquement pertinent » conclue-t-il. Le meilleur serait donc à venir en matière de lutte contre le cancer, dans une utilisation spécifique des molécules de cannabis.

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20 000 patients soignés grâce à lui

C’est avec le père des cannabinoïdes, Raphaël Mechoulam, que National Geographic poursuit son dossier. Cet homme de 84 ans est le premier chimiste à avoir étudié la plante en question et à en avoir isolé les molécules. C’est donc lui qui prouva que le THC faisait « planer » une bonne partie de notre planète et que le CBD possédait des vertus thérapeutiques. Qui plus est, il a aussi découvert que nous possédions des cannabinoïdes dans notre propre corps : les endocannabinoïdes. Nous pouvons les secréter naturellement grâce, notamment, au sport.

Ces substances agissent dans notre système nerveux, en particulier en ce qui concerne notre mémoire, notre gestuelle et nos défenses immunitaires. Vivant en Israël, ce chimiste est un fervent défenseur du cannabis thérapeutique. C’est en partie grâce à ses travaux qu’aujourd’hui 20 000 patients peuvent en bénéficier. Pourtant, contrairement à d’autres, il n’est pas particulièrement favorable à une légalisation du cannabis à usage récréatif, étant de très près concerné par ses effets. Il cite plusieurs études montrant les effets négatifs d’une consommation prolongée de variétés à haute teneur en THC. D’aucuns lui répondront que tout excès est mauvais par nature pour l’organisme.

La cartographie génétique du chanvre

Le magazine s’intéresse également au cas de Nolan Kane, généticien cherchant à cartographier le chanvre. Un travail de grande ampleur puisque celui-ci possède pas moins de 800 millions de nucléotides. Un labeur à la hauteur de ses enjeux. En effet, ses recherches pourraient largement contribuer à la science en déterminant la meilleure variété à utiliser pour soigner telle ou telle maladie, ou encore déterminer les meilleures graines à déguster car il nous rappelle que le chanvre est « source d’une huile très saine et riche en protéine ».

w2-marijuana-a-20140225-870x589Crédit : AFP-JIJI / japantimes.co.jp

De nombreuses firmes pourraient être affectées par ces découvertes. Le magazine cite l’exploitation Mindful, l’une des plus grandes entreprises productrices de cannabis au monde. Pas moins de 20 000 plants y poussent continuellement. Phillip Hague, le propriétaire, est un passionné de la plante, voire même un amoureux qui communique à sa manière avec ses plantations. Loin d’être un projet de taille artisanale, celui-ci dirige un entrepôt de 4000m² alimenté en lumière artificielle. Une partie de ses récoltes sert à produire du cannabis thérapeutique (de l’huile notamment) pour venir en aide aux enfants malades. Située à Denver, aux USA, peu de chance de voir ce type d’entreprise se développer dans l’hexagone.

Le poids de la peur et du conservatisme

La France étant un des pays les plus répressifs d’Europe en matière de cannabis, peu de chance de voir une telle activité s’y développer dans les prochaines années. Certains patients sont d’ailleurs toujours dans l’attente du Sativex (médicament à base de THC synthétique) pour se soigner efficacement. Néanmoins, les partisans d’une légalisation pourront se réjouir de ce dossier pertinent présenté par un grand média reconnu pour son sérieux comme le National Geographic. Aujourd’hui, le cannabis ne peut plus basiquement être stigmatisé comme il l’était autrefois. Et s’il n’est pas ici question d’en faire la promotion, affirmer la vérité à son sujet dans une juste mesure permettra probablement, demain, à des malades d’être encore mieux soignés et de manière naturelle.

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Peut-être certains dirigeants finiront-ils par ouvrir les yeux au sujet d’une plante quasi-miraculeuse, mais qui, au même titre que d’autres produits de consommation courante, mérite d’être utilisée avec contrôle et modération. Il faut également espérer que la science sera autorisée à poursuivre ses études afin de permettre aux nombreuses vertus de cette plante de trouver leur place dans notre univers quotidien en toute liberté.


Sources : nationalgeographic.fr / ufcmed.org / blogs.rue89.nouvelobs.com / National Geographic n°189, juin 2015.

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