À l’occasion des élections législatives françaises qui se tiendront les 11 et 18 juin prochains, le très discret parti « Les décroissant.e.s » présentera des candidat.e.s dans 16 circonscriptions. Alors que la notion n’est plus vraiment tabou chez les militants écologistes de tous bords, ayant même aboutie à une réflexion importante au sein du mouvement France Insoumise, les politiques publiques refusent toujours d’intégrer cette question fondamentale de manière transversale. Au mieux, les décisions sont sectorielles, mais ne modifient en rien les structures de la société soumises à la nécessaire croissance et ce, malgré l’urgence écologique pointée par la recherche scientifique. Pour nous présenter ce mouvement méconnu et ses principales revendications, nous avons échangé avec Théo Stein, suppléant dans la 2ème circonscription du Rhône.

Âgé de 22 ans, Théo Stein est un développeur en informatique qui habite Lyon depuis quelques années. Après les manifestations contre la Loi Travail, il s’engage dans la mouvance décroissante pour pouvoir poursuivre son travail d’opposition. La 2ème circonscription du Rhône, dans laquelle Roxane Hirtzberger est candidate pour « Les décroissant.e.s », est composée des 1er et 4ème arrondissements de Lyon, ainsi que d’une partie des 2ème et 9ème arrondissements. Inspiré de l’idée de finitude et de limites, le parti estime « qu’il faut arrêter de produire au-delà du raisonnable, [et qu’]il faut relocaliser notre consommation et apprendre à vivre autrement ».

-> Lire « Il y a bien une limite à la Croissance« 

« La Croissance n’est pas infinie et nous en subissons déjà tous les limites. » Si ce postulat semble à la fois logique et raisonnable, le mouvement politique qui en découle apparait toujours comme une véritable OVNI dans l’opinion. Nécessairement, la plupart des grands partis l’ont bien compris, il faut vendre du rêve aux électeurs et la promesse d’un pouvoir d’achat croissant… Malgré le manque de visibilité du parti dans les médias et de très faibles moyens, le jeune homme espère que la décroissance puisse récolter un maximum de voix et ainsi participer à la médiatisation des idées défendues par le mouvement dans la société.

« Les résultats des présidentielles ont montré la déception des français.e.s »

Depuis de nombreuses années, les décroissant.e.s défendent une certaine idée politique de l’écologie : « la prise en compte des écosystèmes locaux, et la qualité de vie des habitants, doivent en être les facteurs prioritaires », estime ainsi Théo Stein. Se fondant sur les limites scientifiques et sociales d’un modèle économique qui a érigé la croissance en objectif principal, le mouvement prône au contraire, le ralentissement, au minimum, l’équilibre. En effet, selon le parti, « la croissance économique n’est pas compatible avec la préservation d’un écosystème compatible avec la vie humaine ».

Dans un paysage politique en plein bouleversement, les candidats décroissants veulent faire entendre une autre voix, aussi inaudible soit-elle. Les mesures relatives à l’environnement décidées à ce jour par les gouvernements successifs ne sont pas suffisantes et, souvent, elles n’ont que peu d’effets face à d’autres choix politiques justifiés par l’impératif de la croissance. Par ailleurs, si Théo Stein admet « que les choix effectués par Emmanuel Macron et son équipe sont astucieux » et efficaces pour rameuter les foules, il analyse avec prudence et nuance les premiers pas du nouveau Président et notamment la présence de Nicolas Hulot au gouvernement. L’abandon de Notre-Dame des Landes, suite logique de cette nomination, serait « une bonne chose », mais ne faut-il pas rester prudent ? Face à un « premier ministre […] ancien lobbyiste d’Areva et […] moult conseiller.e.s  du gouvernement qui viennent de grandes entreprises, que peut-on vraiment espérer de la nomination d’un écologiste au milieu du lot de productivistes ? », questionne le suppléant.

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« Si cette crise est prévisible, alors nous pouvons l’éviter ! »

« Les décroissant.e.s » proposent de « rediriger nos activités humaines » vers l’essentiel. Dans ce contexte, il s’agit de « produire localement, grâce aux ressources disponibles, des produits plus utiles et plus adaptés, qui soient aussi plus résistants ». Cette évolution implique un nouveau rapport aux territoires et un changement de paradigme, le culte de la consommation n’étant pas compatible avec les limites physiques de la planète. Ce changement implique donc de « cohabiter avec les territoires et de se réapproprier les décisions politiques en ce sens ». Finalement, la Décroissance tente d’appliquer une logique « éco » dans toutes les particularités de la société dans l’objectif de trouver le plus rapidement possible un équilibre entre l’activité humaine et la nature, tout en faisant gagner en autonomie et liberté l’être humain.

Dessin : SINGERFace aux défis à relever, les objecteurs de croissance nous enseignent que les petits ajustements et les demi-mesures ne sont pas des solutions sérieuses; des politiques transversales et profondes sont nécessaires. Les slogans et promesses creuses ne sauveront pas l’humanité et les écosystèmes. « Choisir nos moyens de production n’est […] pas suffisant, renchérit Théo Stein. Le plus important reste encore de réduire notre production-consommation » et donc en finir avec le mythe de la consommation de masse. Si la transition énergétique fait partie des priorités, celle-ci doit être accompagnée d’un « réapprentissage », notion chère au mouvement. « Nous devons modifier notre imaginaire collectif et ne plus voir la « Croissance » comme la solution à nos problèmes mais comme la cause« , conclut Théo Stein, qui espère que la notion de décroissance puisse convaincre rapidement.


Sources : Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / decroisssance-elections.fr

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