En 2013, la première dégustation de burger fabriqué en laboratoire avait lieu à Londres. L’occasion pour Mark Post, scientifique néerlandais et créateur du burger in vitro de faire valoir son projet. Mais le prix exorbitant du bout de viande, estimé à 250 000 € ne permettait pas d’imaginer une production de masse. Ce bémol de taille pourrait faire partie du passé, puisque l’on apprend aujourd’hui que le coût de production de ce que la presse Britannique surnomme le « Frankenburger » aurait drastiquement chuté pour désormais avoisiner les 10 €. Que va-t-on manger demain ?
Oui, le burger éprouvette existe. À son lancement, son prix était tel que beaucoup se sont moqués des chercheurs. 2 ans après, le cout de production approcherait les 10 euros. Le procédé, long et complexe, mis au point par Mark et son équipe, se passe comme suit : les cellules souches du muscle sont prélevées à l’animal dont on veut « copier » la viande. Elles sont cultivées dans une boite de pétri à l’aide d’un produit chimique appelé « sérum de veau fœtal. »
Placées sur un gel dans une boite en plastique où les éléments nutritifs du sérum de veau sont réduits, les cellules souches s’activent et se divisent en cellules musculaires. Ces cellules peuvent éventuellement fusionner en fibres musculaires appelées myotubes et commencent à synthétiser des protéines. Selon le New York Times, le produit final ressemblerait à « une courte nouille de riz rosée. »
Reste enfin à donner une forme à l’amas de cellules. L’idée du hamburger, produit populaire dans le monde entier, sert probablement à attirer les regards sur le concept. Mais l’idée d’utiliser des animaux pour produire de la viande de laboratoire ne séduit guère tout le monde. Ainsi, l’équipe de Mark Post travaillerait activement à remplacer le sérum de veau pour un produit qui ne s’appuie pas sur un produit d’origine animale.
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Éthique en question
La technique est pour l’instant adaptable à différents types de viandes animales : poulet, poisson, porc,.. Les laboratoires seront-ils alors un jour les nouveaux producteurs de viande à grande échelle ? C’est probablement le vœu des concepteurs de ce burger hors-norme dont le chef de projet résumait ainsi la situation deux ans plus tôt :
« Dans vingt ans, on pourra avoir dans nos supermarchés deux produits ayant exactement le même goût et la même apparence. L’un provenant de la vache qui comportera une écotaxe et impliquera que des animaux aient été tués. L’autre venant du labo sans que personne n’ait eu à souffrir et potentiellement moins cher. »
Si les arguments avancés par Mark Post sont séduisants et nous permettent d’imaginer, à l’instar de l’association PETA, que cette nouvelle forme de production sonnerait à terme le glas des abattoirs et des élevages industrialisés, elle n’est pas sans poser quelques questions d’ordre éthiques.
Outre le mythe de la protéine animale indispensable à la survie et la bonne condition physique qui se verront perpétués, l’exploitation d’animaux sensibles est une condition sine qua non pour le prélèvement de tissus musculaires indispensables aux laborantins. Mais quid quand le procédé sera adapté aux protéines végétales ? Faire pousser des salades en laboratoire sera-t-il moins éthique ? Pour Tara Garnett, directrice du département de recherche sur la nourriture à l’Université d’Oxford, le problème est tout autre :
« On a 1,4 milliard de personnes sur la planète qui sont obèses ou en surpoids et en même temps 1 milliard qui se couchent avec le ventre vide. La solution n’est pas simplement de produire plus mais de changer notre système d’approvisionnement et le prix de la nourriture. »
De l’autre côté de la balance, histoire d’impartialité, nous pourrions citer les bénéfices déclarés pour l’environnement : réduction drastique des gaz à effet de serre, réduction de la surface des terres agricoles exploitées pour élever le bétail ou le nourrir ou encore diminution conséquente de la production de ressources nécessaires aux élevages intensifs actuels dont la raréfaction de l’eau potable.
La viande de laboratoire sera-t-elle dès lors, un jour, la norme ? Retrouverons-nous dans quelques années à la carte de certains restaurants la mention « viande éprouvette » ? L’humanité est-elle prête à consommer ce type de produit ? Quels sont les réels avantages et inconvénients de cette production in vitro ? Seul l’avenir répondra à ces questions qui restent pour l’heure en suspens. Qu’on se rassure, pour l’instant, pas de commercialisation en vue. La mise sur le marché semble peu probable avant de nombreuses années. Quant au débat, il est, pour sa part, plus ouvert que jamais.
En attendant, vous reprendriez-bien un peu de soleil vert ?
Sources : sciencealert / cnet / liberation