Depuis plus d’un an, Benjamin et Julien travaillent sur une idée plutôt utile : une application qui peut détecter les dropshipping afin de prémunir les consommateurs d’éventuelles arnaques commerciales. Il y a un mois, ils ont enfin pu inaugurer la sortie de leur projet, baptisé Captain Drop. Leur mascotte ? Un petit chien héroïque qui flaire, à partir d’une dizaine de critères, les sites de ces revendeurs qui ne font que rediriger leurs ventes vers un fournisseur chinois comme Aliexpress, Wish ou Alibaba… Sans stocks, souvent mensongers, avec un marketing agressif, ces vitrines aveuglantes qui pullulent sur les réseaux sociaux sont un véritable fléau. Mais qu’est-ce qu’un dropshipping et qu’est-ce qui le différencie du commerce classique ? En existe-t-il de bons ? Les deux développeurs répondent aux questions de Mr Mondialisation.

@Captain Drop

Derrière le fier Captain Drop, un simple duo de développeurs : Julien et Benjamin. Le premier possède un parcours plutôt atypique. Carrossier de formation, avec plusieurs années dans le métier à son actif, il décide un jour, un peu las, de quitter le manuel pour se lancer dans la programmation. Aussitôt dit, aussitôt fait. Il s’avère que Julien, son ancien beau-frère, est ingénieur : ensemble, ils imaginent rapidement des projets communs. Mais lesquels ? Dans un premier temps, les deux confrères s’associent dans le domaine du marketing et du développement web. Un marché plutôt instructif.

En effet, au bout d’un certain temps, leur profession les amène à croiser le syndrome dropshipping. Les deux amis le découvrent sur internet, leur environnement de travail, via les publicités sponsorisées et des « influenceurs » peu scrupuleux. Mais également depuis l’envers du décor, à des sommets internationaux pour les professionnels. L’un d’entre-eux se déroule à Bangkok, en 2019. Sur place, les dropshippers prêchent leur nouveau modèle, devant des centaines de personnes enthousiastes. Le ton est donné. Un ton qui trompe aujourd’hui des internautes par milliers, y compris dans l’entourage des deux associés. Car le dropshipping peut convaincre n’importe qui : il en existe des faciles à déceler, certes, mais également de plus pernicieux… C’est cette effervescence peu éthique qui les a convaincus de se consacrer à un outil de checking automatisé. Ils nous racontent.

Mr M. : Tout d’abord, pouvez-vous définir le dropshipping selon vous ?

Julien : Le dropshipping, c’est tout simple. C’est une personne qui met des produits en vente qui ne lui appartiennent pas et, surtout, pour lesquels il n’a même pas contacté le fournisseur. Quand il reçoit une commande sur sa boutique, il se contente de dire au site low-cost d’origine : « Tu m’envoies ça chez telle personne, tu m’envoies ça chez telle autre » et ainsi de suite. Il n’a ni stock, ni s.a.v. Alors, il y a quelques dropshippers qui vont parfois en avoir un et qui vont rembourser si le produit ne convient pas : ce sont des boutiques qui tiendront un an, voire deux. Mais la boutique qui ouvre, puis qui ferme en trois semaines, sachant que les produits, venant de Chine, mettront justement trois semaines à arriver jusqu’au client… Elle ne gère rien en fin de compte et fait juste de la publicité pour un produit sur lequel elle n’ajoute aucune valeur. 

Benjamin : Le point que les dropshippers soulèvent parfois pour justifier la marge qu’ils génèrent est justement cette publicité ciblée qu’ils mettraient au service du produit… Mais bon, des commerçant le font déjà pour leurs produits depuis longtemps et ils ne prennent pas ce genres de marges pour le faire. Puis là, le problème, c’est que les dropshipping, c’est beaucoup de mensonges : des fausses promotions, des fausses informations, pas de services, des compteurs, des publicités agressives. Et en plus, apparemment, ils ne payent même pas leurs charges françaises. On essaye de se battre contre ça, de montrer au consommateur qu’ils ne font pas d’affaires en réalité. 

Greenwashing : Site de bijoux low-cost There is no planet B
Version Aliexpress

 

D’une idée à sa concrétisation, il peut y avoir tout un monde. Un événement (de trop) vous a-t-il décidé à passer le cap ? 

Julien : C’est l’année dernière, en 2019, que tout a commencé pour Captain Drop. On s’était rendus à un salon de l’affiliation à Bangkok. C’est la première fois qu’on rencontrait autant de gens qui travaillaient dans le même milieu que nous : le marketing et le développement web. Là-bas, on a assisté à énormément de représentations sur scène et c’est là qu’on a pu voir une arrivée massive de gens qui commençaient à parler de « l’Eldorado » qu’est le dropshipping. Parmi eux, les frères Tan sont intervenus : ceux-là, ce sont d’énormes dropshippers, des multimillionnaires. Ils ont alors expliqué en quoi ils avaient un peu inventé le concept, qu’ils avaient énormément de boutiques, des boutiques éphémères qui durent un mois, qu’ils ferment très vite pour en recréer d’autres aussitôt : en permanence. C’est leur business. 

Un business dans lequel on a jamais voulu entrer. On ne cautionne pas ce type de marketing, ça ne fait pas partie de notre éthique. On pensait d’ailleurs que ça ne marcherait pas du tout. Mais par la suite, on a vu en 2020, avec le confinement, les boutiques de dropshipping exploser. C’est-à-dire qu’on ne pouvait même plus les compter. Même en France, le nombre de dropshippers était devenu hallucinant. C’est là qu’on a commencé à se dire qu’il fallait faire quelque chose et qu’on a imaginé Captain Drop. Aujourd’hui encore, les remontées de l’application confirment cette impression.

Benjamin : Pour moi le pire ce sont ces influenceurs qui promeuvent des dropshippers à foison sans même se renseigner sur l’activité qu’il y a derrière ou depuis combien de temps la boutique est présente. Ma conjointe, qui est plutôt au courant quand même, avait ramené un jour une sorte de lisseur, sur lequel elle s’était dit qu’il y avait eu une super promotion. Je lui ai demandé où est-ce qu’elle avait commandé ce produit et, en fait, elle s’était faite avoir par un dropshipping. Je me suis dit que ce n’était pas possible que les gens, même en étant un peu informés, continuent de se faire avoir. Dans l’entourage de Julien c’est pareil, il y a eu des cas d’achat de dropshipping avérés. Il faut que les gens soient au courant, non pas pour aller acheter la version Aliexpress, mais qu’ils s’aperçoivent que cette version existe et qu’ils vont donc acheter un produit qui vaut en réalité moins d’un quart du prix affiché. Voilà d’où est partie, aussi, l’idée de Captain Drop. 

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À ce propos, certains blâment justement la crédulité du consommateur : êtes-vous d’accord ? Qui sont les cibles du dropshipping ? Et comment se font-elles avoir ?

Julien : Certains pensent que les consommateurs sont des moutons. Ils vont souvent commenter sous les publications et donner l’impression que ce sont des sites faciles à détecter. Le problème, c’est que les gens qui se sont fait avoir, ne vont, eux, pas forcément oser s’exprimer ou s’en vanter sur les réseaux sociaux. Ils ne vont pas vouloir exposer à leurs amis qu’ils se sont fait arnaqués. Mais en réalité, tous ces gens sont dans notre entourage. A Noël, par exemple, il y a eu un jouet, le « Power Ballon », qui s’est vendu comme des petits pains, même dans nos familles ! En ce moment, pour la Saint-Valentin, on peut aussi se faire avoir par « L’ours rose véritable »… véritable plastoc ! Il y a eu aussi le poulpe réversible, l’espèce de rose sous cloche (de plastique), les culottes menstruelles, les Moggs… Je pense que le problème, c’est que les gens ne s’en rendent pas compte : Monsieur-tout-le-monde ne comprend pas d’où ça vient, il pense avoir à faire à une vraie enseigne, alors que la boutique va fermer le lendemain…

@CaptainDrop

Et en plus, on voit désormais émerger des boutiques où les propos sont complètement faux. L’année dernière, c’était encore plus ou moins vrai, mais, à présent, on peut carrément lire que c’est du « Made in France ». Une boutique de bijoux prétend même en ce moment faire du « Made in Aix en Provence » et beaucoup de rappeurs en ont ouvertement fait la promotion. Sans parler de l’écologie ! Avec la lessive qui fait un carton… Les dropshippers font aussi semblant de participer à des œuvres caritatives, en promettant maintenant que, si nous achetons un bracelet, de l’argent sera reversé à une association…ce qui est complètement faux. Ils y vont quoi.

Benjamin : Oui comme « sauver les koalas » , les promesses de l’écologie ou les fausses promotions. Un autre effet marketing et mensonger permet d’attirer les clients : ils avancent une promotion exceptionnelle sur 200 euros pour tomber à 100 euros, alors que c’est encore largement au-dessus de la valeur réelle du produit. Hier, on a trouvé un set de couteaux de tables à plus de 400 euros au lieu de moins de 20 sur Aliexpress

En ce moment, on est en plein dans la dérive : les dropshippers sont au pic. Ils profitent des influenceurs pour se faire entendre par un public bercé à la télé qui pense que ces gens, de l’autre côté de l’écran, sont dignes de confiance, alors qu’ils les bernent. Mais quand les gens auront l’habitude de vérifier ce qu’ils achètent, on s’en sortira déjà mieux. On commence déjà à en sortir, on le voit  : tout le monde commence à en parler. Il faut en parler.

Parmi les autres arguments en faveur de cette démarche, l’idée que tous les dropshippings ne seraient pas des arnaques : y a -t-il un bon drop-shipping selon vous ? Si oui, lequel ? 

Julien : On n’a pas d’exemples qui nous viennent. Mais ce qu’on a vu comme dropshipping qu’on a laissé passer, ce sont des sites qui font de véritables créations vestimentaires ou en bois, mais vont agrémenter leurs boutiques de petits accessoires. Ça reste très compliqué pour nous dans ces moments-là : l’application nous remonte un doute et nous devons prendre une décision. Qu’est-ce qu’on fait ? Eh bien, on essaye de se renseigner sur les retours clients ou d’autres aspects plus subtils : en général, on le passe en site « à doute ». 

Inversement, il y a des sites qui ne sont que des arnaques, sans être des dropshipping. On ne les met pas non plus dans la même catégorie. Il y a des sites de tennis de marque, par exemple, qui sont des contrefaçons ou de fausses vitrines qui n’envoient jamais les produits, mais qui encaissent avant de disparaître. Là, le chien de Captain Drop montrera une arnaque explicite.

A ce sujet : Comment fonctionne l’application ? Quels sont ses critères de tri ?

Julien : Une fois sur Captain Drop, vous devez juste copier le lien de la boutique dont vous doutez. L’application vous donnera directement son verdict avec les produits similaires trouvés sur les sites chinois. Pour cela, elle se base sur plein de critères, à partir de milliers de boutiques de dropshipping, et de leurs points communs. Rapprochement d’image, techniques de ventes, syntaxe, ancienneté : une dizaine de points sont pris en charge par l’intelligence artificielle qui se nourrit des données qu’elle puise et traite depuis les dropshippings avérés. Plus il y a d’utilisateurs, plus elle sera efficace. Pour le moment, on a encore quelques faux-positifs, et on y travaille tout le temps, c’est notre rôle d’apporter toujours plus de subtilités grâce à notre œil humain. Pour l’instant : un dixième des sites remonte en doute.

Benjamin : Pour faire face à ces doutes, on espère aussi pouvoir compter à terme sur une communauté. Ce seront les retours collectifs qui nous permettront d’y voir plus clair : si le site est un dropshipping ou un site fiable.

@Captain Drop

 

Ces critères ne prennent donc pas en compte les enseignes classiques. Or, beaucoup disent que le dropshipping chinois (revendre 30 euros un produit à trois euros) reposerait sur les mêmes principes que la grande distribution ? Vraiment ?

Julien : Bon, quand on va chez Gifi, on pourrait se dire que ce sont de gros dropshippers. Eux aussi achètent chez des fournisseurs du même acabit pour revendre quatre fois plus cher. On en pense ce qu’on veut, mais, eux, ils gèrent des stocks, des caissier.e.s, des vendeuses.rs, un s.a.v. Ce qui fait la différence, c’est quand même cette plus-value. Le dropshipper, lui, n’a pas de stock et n’offre pas de service. C’est-à-dire qu’il crée un site Shopify, qui automatise en plus aujourd’hui toute la partie gestion de paiement, et fait juste de la publicité dessus. Ce n’est pas ça être commerçant. On ne peut pas du tout les mettre dans le même panier : chez le second, il n’y a aucune gestion clientèle. En deux clics, on en ouvre un, en deux clics, on le referme. 

Benjamin : On a essayé de faire un tunnel dropshipping, sans le mettre en ligne bien sûr, pour voir comment ça marchait vraiment : en fait, on va sur Shopify, on choisit notre produit, on fixe notre prix, on écrit notre description produit et le tout ne prend pas plus une heure. Derrière, quand les gens commandent, on reçoit des emails. On a ensuite des composants qui permettent, en un clic, de rediriger la dite commande sur Aliexpress. Autrement dit : le client entre donc sa carte bleue sur notre site, ses informations personnelles et bancaires, déclenchant un payement sécurisé, mais, dès lors, automatiquement, une machine s’enclenche et entre ses coordonnées de livraison sur Aliexpress, valide la commande et fait donc expédier le colis chez la personne, comme un simple utilisateur. Le dropshipping encaisse, finalement, disons 100 euros, pour un produit qu’il paye 10 centimes sur le site Aliexpress : c’est tout ce qu’il se passe. C’est comme si on rémunérait une personne pour faire notre commande Amazon et que celle-ci facturait ce service 100 euros. C’est limite, plutôt, un prestataire qu’un commerçant. Un prestataire dont les services s’élèveraient à des prix exorbitants. 

Beaucoup nous alertent sur le cas des Gargouilles, une marque particulièrement influente de boules de lessives, et dont les produits sont pourtant disponibles sur Aliexpress. Que pensez-vous de ce cas particulier ? 

Page d’accueil du site des Gargouilles
Boule de lessive identique Aliexpress

Julien : C’est malheureux à dire, mais ils ont été excellents sur leur image. Ils utilisent sûrement des commentaires filtrés. En tous cas, ils utilisent toutes les techniques de marketing Facebook, ont des auto-filtres parfaits, avec une politique très stricte. Beaucoup de visuels, des vidéos même, et ils jouent surtout sur l’éco-responsable, avec des boules « en plastiques » quand même, mais ça, n’en parlons même pas ! Enfin bref : il ont compris que les gens étaient touchés par l’écologie… 

Benjamin : Alors, de mon côté, je ne sais pas si c’est du dropshipping au sens où on l’entend parce que, eux, semblent avoir une masse de clients importante et donc peut-être avoir du stock. Ils se fournissent très certainement sur des sites chinois, mais je suppose qu’ils gèrent leur marchandise. Je pense en réalité que c’est plutôt une marque blanche. Ils prendraient un produit qui n’a pas de marque, contacteraient le fournisseur et demanderaient à apposer leur logo dessus. Est-ce qu’on peut les considérer comme des passe-plat façon dropshipping ? Je ne sais pas. On n’a pas réussi à trancher nous-mêmes. Ils semblent envoyer, à travers un gros branding, leurs propres cartons. Une marque blanche, c’est du dropshipping déguisé en réalité, mais ici, ça revient surtout à laver ses habits avec de l’eau. Ce sont les mêmes billes que celles de la douchette filtrante qui seraient miraculeuses… Ce sont des produits fabriqués en Chine, à faible coût, revendus dix fois le prix.

Quand ils sont cernés, un des contre-arguments des dropshippers est de retourner la culpabilité en accusant les sites comme Aliexpress de copier leurs créations. Est-ce possible ? 

Julien : On a vu le même problème, de l’œuf ou de la poule, avec un masseur oculaire. Sur la vidéo, c’est Stéphane Berne qui teste le massage, présenté à 139 euros… On a regardé sur Aliexpress, c’est exactement le même produit, pour une vingtaine d’euros : les mêmes boutons, le même design, tout ! Et ça cartonne à mort. En dessous des commentaires, ils n’arrêtent pas d’ajouter « Attention aux contrefaçons ! C’est le vrai produit que nous vendons ». Bon, on voit à la qualité que c’est plutôt fabriqué en Chine [voir ces retours produits]. Mais le problème, c’est qu’on ne peut pas en être sûr et ce serait dangereux de nous avancer.  

Benjamin : Pour avoir la réponse, il suffirait en réalité d’aller regarder sur internet quand le site de dropshipping a été créé, puis quand la fiche produit de Aliexpress a été créée et de relever qui est apparu le premier ! [ndlr. Il est difficile de savoir exactement quand un produit Aliexpress a été mis en ligne, mais en quelques clics nous avons pu déterminer que le nom de domaine les-gargouilles.com existe seulement depuis mai 2020, alors que l’article d’un blog de test matériel faisait la promotion de boules de lessives d’origine low-cost dès janvier 2020]. Après, les créations « révolutionnaires » comme ils l’annoncent sont normalement protégées par un brevet… En tous cas, c’est ce que je ferais si j’avais inventé un produit miraculeux. Et donc, il ne devrait pas y avoir autant d’imitations sur internet, du moins pas aussi facilement trouvables. C’est de la surenchère marketing en fait. 

Le dropshipping étant « légal » – puisque s’insérant dans les brèches d’un système juridique qui n’a pas encore acté sur ce nouveau sujet – redoutez-vous les retours des dropshippers ? En avez-vous déjà reçus ?

Julien : On a travaillé nos mentions légales pour qu’elles nous déchargent. Notre application est basée sur une intelligence artificielle qui apprend : donc plus il y aura d’utilisateurs, plus l’application comprendra ce qu’elle est en train de trier. En attendant, elle peut faire des erreurs qu’on vérifie, nous, du côté humain. Elle n’est donc pas infaillible et cette dimension sur laquelle nous sommes transparents nous protège. On est aussi vigilants sur les mots : on montre à l’utilisateur ce que l’application a trouvé de similaire et si on « pense » que c’est un dropshipping ou non. C’est ensuite à l’utilisateur de se faire son idée. C’est une orientation. Mais on encourage les boutiques qui se considèrent faux-positif à nous contacter. Pour l’instant, nous n’avons pas reçu de menaces ou de retours, mais l’application est encore jeune et on se prépare à en recevoir. 

En ce moment, les dropshippers se rendent compte que le business n’est plus si lucratif, et décident de se reconvertir en formateur dropshipping. Ces formations peuvent être financées par l’Etat. Le saviez-vous ? Comment imaginez-vous la suite du dropshipping ?

Benjamin : C’est le cas depuis 2019. Tout le monde a vu dans le milieu qu’il y a eu une apparition soudaine de formateurs en dropshipping, ou de formateurs qui forment de futurs formateurs, et ainsi de suite. Parce que le marché est saturé en fait. C’est d’ailleurs peut-être aussi pour cette raison qu’ils redoublent tous de mensonges pour vendre, histoire de se démarquer. Le message des formateurs est le même partout : « Je vais vous apprendre a faire du dropshipping : site clefs en main, vous allez devenir riches pour 1997 euros, ce sera l’eldorado de la richesse… ». Les mots magiques sont dits : riche, dropshipping, facile. C’est comme ça que tout avait commencé il y a environ deux ans. 

Julien : Le problème, c’est que le dropshipping dans toutes ses dérives, formations ou sites, est en train de mettre en péril les vrais commerçants. Ils sont, en fait, en train de pourrir le petit commerce honnête en ligne. Et ceux qui en sortirons vainqueurs, c’est Amazon, parce qu’ils ont une politique de vente très stricte à laquelle se référeront les clients. Ce que je redoute, c’est que les personnes qui vont vouloir se lancer et ouvrir une petite boutique en ligne, même éthique, seront potentiellement lynchés parce que les dropshipping auront trop trahi la confiance des acheteurs. D’un autre côté, ça peut aider les gens à être plus exigeants sur la transparence des boutiques. C’est aussi pour faire changer les choses dans ce sens là qu’on a créé Captain Drop.  

Benjamin : On espère déjà que l’application permettra aux consommateurs de se rendre compte de ce qu’ils achètent. Et peut-être aussi aux influenceurs, que ça leur serve à vérifier plus facilement – aussi par peur de se faire griller – leurs « partenaires ». Ils pourront se dire « bon, voilà, en un coup d’œil, je sais ce que je relais ». Ils seront en pleine conscience de la publicité qu’ils feront.

Le but final est que les gens prennent l’habitude d’avoir un regard critique sur le produit. Ils ont une confiance trop aveugle pour l’instant : la plupart des gens s’arrêtent trop souvent au payement sécurisé que tout le monde peut afficher facilement aujourd’hui (le fameux « https »). Il faut à termes une entité, peut-être comme ce qu’on fait si ça se développe comme on l’espère, qui aide à certifier les boutiques pour ces personnes néophytes. Une sorte de 60 millions de consommateurs, mais plus rapide, plus ludique. On essaye de l’être aujourd’hui et ça se fera avec l’aide, aussi, d’une communauté qui reporte les arnaques. 

A force, on espère que les vendeurs changent également, en réponse à cette exigence. Si les gens y adhèrent et prennent le temps de vérifier leurs achats avec Captain Drop, on peut même développer l’application pour qu’elle « renifle » tout type de site. 

Pour finir, comment l’application vous rémunère-t-elle ? 

Benjamin : On a une source de rémunération principale : c’est les dons des utilisateurs. Sur le site, il n’y a pas de publicités, ni de demande d’inscription. En d’autres termes, on ne récupère pas de données personnelles. Une fois que l’utilisateur a flairé son dropshipping grâce au petit chien de CaptainDrop, une fenêtre propose de faire un don, tout simplement. C’est cette participation qui nous fera vivre et qui compensera, on l’espère, nos infrastructures, l’hébergeur web, et tous les autres frais annexes à la maintenance du site.

On a cependant une autre source de rémunération infime, mais c’est très important qu’on soit transparents à ce sujet : quand vous faites une recherche, pour vous prouver que c’est un dropshipping, on affiche les versions low-cost d’origine d’Aliexpress. Notre but n’est pas d’inciter à acheter sur ce site et on espère justement le contraire : qu’en voyant la provenance et la véritable qualité du produit, les utilisateurs se redirigent vers des commerces de proximité, éthiques et honnêtes. On travaille d’ailleurs en ce moment au développement d’une redirection vers ce genre de boutiques, avec des propositions d’alternatives. Mais pour l’instant, si vous cliquez sur un lien Aliexpress, il y a un système d’affiliation qui nous reverse un ou deux centimes, ça reste minime. Il fallait tout de même être franc à ce propos, sachant que, nous, ce qu’on espère dans l’idéal et qu’on incitera à termes, c’est que les gens se disent : « J’ai évité une arnaque de 50 ou 100 euros, bon eh bien, je vais aller acheter ce produit dans un véritable atelier et verser un don à l’application ». 

L’application : https://captaindrop.com/ 

Leur page Facebook : https://www.facebook.com/captaindropcom 

– Propos recueillis par Sharon Houri pour Mr Mondialisation

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